L'histoire :
En 1986, Arnaud (le scénariste) découvre les Béruriers noirs à la faveur d’un échange de cassette sous le manteau, dans la cour. Il découvre l’underground et la jubilation de la transgression. Quelques années plus tard, à Metz, c’est Nicolas, le dessinateur, qui fait la même découverte, de la même manière. En 89, tous les lycéens connaissent les Bérus. Le rock alternatif n’est plus underground, alors que la Mano Negra, en 89, sort son deuxième album, Puta´s fever et explose le box-office. Le punk naît en 76-77 aux USA et explose en Angleterre, devenant un phénomène culturel et politique qui véhicule des idéaux anarchistes et contestataires. Les arts y sont sauvagement mélangés, avec des albums aux couvertures extrêmement créatives, des paroles poétiques et revendicatrices, et des sons distordus et poussés à leur paroxysme. D’abord confidentiel à la toute fin des années 70, des activistes lui permettent d’exister et de se développer ; c’est Alain Maneval, animateur de l’émission Pogo sur Europe 1, ou Marc Zermati, fondateur du label Skydog. En 78, plus de 200 fauteuils sont détruits au cours d’un festival punk à l’Olympia…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
« Vivre libre ou mourir ». Telle était la devise des amis de la constitution pendant la révolution française, puis des résistants du plateau des Glieres. Chanson enfin, emblématique, des Béruriers Noirs, groupe phare du phénomène punk français dans les années 80. La filiation est difficile à porter, mais les punks ont réellement décongestionné la société et ont souvent soufflé un vent de fête et de liberté jusqu’au milieu des années 90. Arnaud le Gouefflec et Nicolas Moog ont déjà travaillé ensemble, sur une bible similaire, Underground, grandes prêtresses du son et rockers maudits. Ils nous livrent aujourd’hui un album amoureux, encore une fois, de la vague libertaire des années 80/90. Les lecteurs de la génération x retrouveront avec nostalgie leurs amours d’adolescence : Gogol 1er, les VRP, les Garçons Bouchers, les Nonnes Troppo et on passe. Les Bérus bien sûr. Ils lâcheront certainement une petite larme dans leur bière. Comme dans Underground, Moog propose un noir et blanc au trait épais, très simple et clair, sauf lorsqu’il s’agit de croquer les acteurs de cette période folle. Il y a beaucoup de tendresse dans les dessins, mais aussi dans les textes de le Gouefflec qui s’appuie sur des interviews avec Loran, des Bérus ou Didier Wampas, et bien d’autres. Ils racontent leur aventure extraordinaire de stars, de porte-parole d’une génération, mais aussi et surtout – et c’est là que ça devient encore plus intéressant – leur vécu au quotidien d’une société de plus en plus violente, de la souffrance des petites gens, d’une jeunesse mise de côté, des grandes luttes antiracistes (mythique « La jeunesse emmerde le Front National » des Bérus). C’est finalement un témoignage complet, une photographie artistique bien sûr, mais aussi sociale et politique des années Mitterrand. Bien entendu, les chapitres sont courts et partent dans toutes les directions. La lecture est à la fois facilitée par l’absence de cases, mais rendue difficile par l’absence de sens. C’est joyeusement bordélique, foutraque et extrêmement riche, documenté au poil et traité, encore une fois, avec beaucoup d’amour. Punk, quoi.