L'histoire :
Il y a plus de 5000 ans, un vieil homme du nom de Vyasa vient de terminer la composition d'un grand poème au travers duquel il raconte comment ses ancêtres sont nés, ont grandi et comment ils ont fait face à une vaste guerre. Mais le vieux conteur ne sait pas écrire et recherche par tous les moyens un scribe. Et contre toute attente, c'est Ganesha lui-même qui se propose d'écrire le récit de Vyasa en commençant par interroger le vieil homme sur ses origines. Fruit de l'union entre un roi vieillissant et une fille de pêcheur, le conteur a engendré deux fils, Pandu et Dhritarashtra, nés du ventre de deux princesses, Satyavati et Amba. Élevés par le roi Bhishma et Satyavati, les deux princes aux tempéraments différents ont évolué en prenant des trajectoires opposées pour, au final, devenir les fondateurs de deux lignées cousines et constamment en guerre : les Pandavas et les Kauravas...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Trois ans ! Il aura fallu trois ans de travail ininterrompu à Jean-Claude Carrière pour mettre sur pied son adaptation graphique et aménager le récit du plus grand poème du monde : le Mahâbhârata. En effet, l’histoire initiale se focalise sur les querelles dynastiques qui opposent les Kauravas et les Pandavas au travers desquels évoluent une bonne quinzaine de personnages centraux dont Krishna, qui apparaît-là pour la première fois dans la mythologie indienne. De fait, l’auteur a dû épurer son adaptation de très nombreuses intrigues secondaires et travailler sur les transitions de façon à garder de la cohérence dans sa vision de ce texte fondateur. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’ensemble est fort bien ficelé. Ainsi, on rentre plutôt vite dans cet énorme pavé de 440 pages, pour se laisser happer au cœur des légendes indiennes. Jean-Claude Carrière a réussi le tour de force de permettre aux lecteurs de découvrir les nombreux protagonistes du Mahâbhârata afin d’appréhender cette mythologie riche de plus de 250 000 vers, qui a façonné l’Inde et ses environs au cours des siècles. Il faut dire que l’homme avait déjà travaillé sur le sujet depuis quelques années, notamment dès 1985 avec la pièce de théâtre de Peter Brook lors du festival d’Avignon ou au cinéma en 1989. Bien évidemment, même si le lectorat Européen, peu au fait de la religion hindoue et des différentes épopées de ce long poème, n’est pas en capacité de juger de la fidélité de son adaptation par le scénariste, il faut bien avouer que l’ensemble se lit avec limpidité. Et mine de rien et malgré ses racines très anciennes, Le Mahâbhârata distille ici et là quelques prismes de visions plutôt modernes, notamment en ce qui concerne la religion, la politique, la sociologie ou bien la morale, sous l’égide du Dharma, la loi qui régit le monde et le cœur des hommes. Qui plus est, les dessins de Jean-Marie Michaud donnent une plus-value indéniable au récit mystique dans un parfait équilibre entre un graphisme indien prégnant et des approches artistiques formatées pour le lectorat européen. Au final, l’adaptation en roman graphique du Mahâbhârata s’avère être une véritable réussite. Même si cette fresque est à l’origine inassimilable du fait de sa complexité, Jean-Claude Carrière est parvenu à la rendre lisible pour le lecteur lambda. Voilà une excellente occasion de faire connaissance avec la vraie mythologie indienne... loin des standards tape-à-l’œil du Bollywood !