L'histoire :
Duca Lamberti était médecin… avant qu’il ne soit radié de l’Ordre, pour pratique sauvage de l’euthanasie sur une vieille dame en fin de vie. A sa sortie des 3 années de prison, il est contacté par un riche homme d’affaire italien, Auseri. Ce dernier l’embauche en connaissance de cause pour une mission très particulière. Son fils de 24 ans, Davide, a sombré dans l’alcoolisme et rien ne semble pouvoir l’en sortir. Le père a eu beau essayer la méthode douce, la discussion, ou même de lui flanquer des raclées, Davide se saoule dès qu’il le peut et à longueur de journées. Auseri demande à Lamberti de ne pas lâcher Davide d’une seconde pendant 3 mois, jusqu’à son sevrage complet. Lamberti a besoin d’argent, il accepte. Il fait ainsi la connaissance de Davide, un jeune homme totalement introverti, passif et sans ambition, qui ronge visiblement un traumatisme passé. Lamberti est très direct avec lui : pour lutter contre son alcoolisme, il va lui falloir comprendre l’origine de sa culpabilité. La première nuit, Davide tente de se suicider en se tailladant les veines. Lamberti le soigne et l’engueule : il aurait été dans une sacrée merde si sa tentative avait réussi ! Il le trimballe partout et lui fait partager sa vie privée…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce thriller noir est adapté par l’italien Paolo Bacilieri d’un roman de son compatriote Giorgio Scerbanenco, spécialiste du polar. L’intrigue est portée par un duo peu habituel : un ancien médecin radié de l’ordre et un fils-à-papa alcoolique et boulet. Bien qu’il ait été médecin, Duca Lamberti incarne la figure du détective, volontaire, franc, direct, avec une mission complexe et ses entrées dans la police. Passif et sans charisme, Davide Auseri, lui, noie sa culpabilité dans l’alcoolisme, dont doit le sortir Lamberti. On en dévoile la raison (alerte spoiler !) car elle est rapidement identifiée par le héros et étayée par l’image de couverture : Davide est persuadé d’avoir tué une jeune femme. Pas directement, mais il s’en veut d’une décision fatale. La narration s’emploie à détricoter le processus qui a abouti à la mort de cette femme, donc à la culpabilité de Davide, donc à son alcoolisme. La bande séquentielle n’obéit ici en aucun cas aux canons narratifs du 9ème art. Le découpage passe souvent du coq à l’âne, sans transition et il se montre très (très) bavard ! Les phylactères s’entremêlent par-dessus les cases, se répondent, se perdent dans des digressions superfétatoires, se succèdent dans un ordre qu’on peine parfois à identifier… Mais ils construisent petit à petit, en passant par quatre chemins et en coupant les poils dans le sens de la longueur, les personnalités complexes du thriller, la mécanique des situations, les causes et les conséquences. Le découpage se montre tout aussi original, avec de très larges gouttières, des toutes petites cases parfois, ou a contrario des géantes et plein d’astuces de superpositions. Bacilieri conserve un dessin semi-réaliste en noir et blanc, alternant les mégas gros plans sur les visages expressifs et les décors urbains, avec un recours massif aux trames de points pour les zones d’ombres. Or des zones d’ombres, dans ce thriller mafieux à tiroirs, il y en a une bonne dose…
