L'histoire :
Sept ans après la première expédition de Bastida dans le golfe Urbaba, à la frontière de la Colombie et du Panama, deux autres expéditions espagnoles sont programmées à partir de Santo Domingo, dans l'actuel République dominicaine. Cependant, tous ceux qui ont des dettes ne peuvent prétendre à l'embarquement. C'est le cas de Vasco de Nunez, soldat, qui le fait clandestinement. Sa présence déplaît fortement au chef de bord : Enciso, et Nunez échappe de peu aux fers grâce sa connaissance de la région de destination. Cependant, ce chef est tellement incapable et injuste, qu'il est démis de son autorité par un nouveau conseil, une fois installé à terre. C'est Vasco et ses hommes qui vont assumer la « pacification » des tribus belliqueuses environnantes, et traverser le Darien au travers de forêts épaisses et de montagnes, enrichissant grandement la couronne au passage, jusqu'à découvrir pour la première fois la côte pacifique. Mais cela aura un prix...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En 1992, à l'occasion des 500 ans de la découverte des Amériques, les éditions Planeta Agostini créaient la collection Relatos del nuovo Mundo et éditaient 25 titres. Celui-ci était le dixième. Cette édition reprend à peu près ce travail, complété du dossier documentaire de l'époque. Le récit historique de Cristobal Aguilar Jiménez nous conte dans le détail cette aventure à la fois rocambolesque, dramatique et exceptionnelle, resituant justement la violence avec laquelle ces découvertes se sont faites, au détriment du droit des hommes. Au-delà de ce travail, c'est un régal graphique auquel nous invite Enrique Breccia. Son trait ample mais presque invisible, tout en courbes, dans des cases réparties sur trois bandes seulement par page, se met simplement au service de couleurs éblouissantes remplissant les formes esquissées. L'aquarelle flamboie de toutes les ressources que ce pays, l'Isthme d'Adrien, pourvoie. Du golfe d'Uruba, d'où l'expédition est partie, jusqu'à la baie de Panama, 250 km plus loin à travers les forêts et les montagnes. Le vert de la forêt, où il faut se frayer un passage à coup de machette, les plumes chromatiques des Ara, dont se couvrent les indiens, aux flèches empoisonnées, le rouge sang des conquistadores démembrés ou des indiens torturés, l'orange de la peau de ces autochtones burinés par le soleil, ce soleil brillant, tel l'or hyper présent dans leurs parures, qui va rendre fous ces envahisseurs ivres de pouvoir... Tout cela flamboie, oui, mais s'agence dans une grande homogénéité avec les textes of et les dialogues, faisant de cet album un exemple fameux de ce que peut et doit être une BD historique de ce type. L'histoire est belle, même si dure, et la dernière aquarelle, en pleine page, dit tout de la réussite de ce projet éditorial : de la grande œuvre, sous le signe du sang et du soleil.