L'histoire :
En 1740, Isaac, alors âgé de 24 ans, s’engage comme matelot à bord du Wager, l’un des navires de la flotte britannique missionnée pour attaquer la flotte espagnole sur les côtes du Pérou, après être passé par le cap Horn et être remonté par le littoral Pacifique de l’Amérique du Sud. Commandé par le commodore George Anson, le Wager est une vieille frégate de 28 canons qui longtemps été affectée à la course des Indes orientales. Isaac trinque un dernier soir avec ses amis dans une taverne de Londres, puis le Wager lève l’ancre le lendemain à l’aube. Au total, les 5 navires qui appareillent comportent 1410 marins, parmi lesquels des fous et des prisonniers. Hélas, la flotte se retrouve chahutée par une violente tempête au niveau du Cap-Horn. Le Wager se détruit sur des récifs. Quelques dizaines d’hommes parviennent à s’en tirer en mettant une chaloupe à la mer. Ils parviennent à rejoindre une île déserte au Sud du Chili. Ils survivent les premiers jours en chassant les phoques avec des pierres. Puis des indigènes en canoës les trouvent et leur apportent des brebis. Mais la proximité des femmes autochtones excite certains membres de l’équipage. La situation dérape et les indigènes les abandonnent…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C’est une histoire de naufrage et de rescapés, comme il en existe beaucoup sur l’époque des grandes explorations et de la piraterie maritime, entre le XVème et le XIXème siècle. Le Wager (qui signifie en anglais le « pari ») a bel et bien existé : il battait pavillon britannique et partait en guerre avec toute une flotte à l’assaut des colonies espagnoles du Pérou. Les conditions météo l’ont arrêté bien avant… Cette histoire narrée par l’argentin Pablo Franco est quasi documentaire : le scénariste est allé piocher sa documentation dans diverses correspondances et journaux de l’époque, pour reconstituer les faits au plus proche de la véracité historique, tel un puzzle. Néanmoins, si le souci de vérité est à louer dans cet album en one-shot, celui de la narration laisse à désirer. Franco use et abuse en effet des encadrés descriptifs (95% des textes) et des séquences muettes. Cette solution de facilité permet à la fois de se prémunir d’un souffle épique artificiel, de laisser le lecteur interpréter et de décrire ce qui est illustré. Or ce qui est illustré a bien besoin d’être décrit, tant le procédé de peinture utilisé par Lautaro Fiszman confine à l’expressionnisme hard boiled. Heureusement que le héros est d’une rousseur qui défie l’entendement, car cela permet de le repérer (parfois) au milieu des grands coups de pinceaux et de truelles dans les tons sombres et torturés. Pour autant, sur le plan pictural, c’est un sacré boulot, très intéressant et plutôt maîtrisé… Mais adapté au 9ème art, sur un récit de 96 pages, cela donne une impression de confusion généralisée, très peu immersive.