L'histoire :
Carucha est dans une cave, assis sur une petite chaise, les mains liées dans le dos. Lui qui se décrit comme un criminel de bas étage passe un sale moment aux mains de la mafia russe locale de Buenos Aires, les membres de la famille Renko. Il avait soi-disant rendez-vous avec les Caraciollo, qui dirigeaient la ville jusqu'à peu. N’était-ce pas un piège ? Davinsky, lui, est un petit homme, insignifiant et vieux, prenant le bus chaque jour. Ancien flic, pas ripoux mais salaud patenté, il ne lèvera pas le petit doigt lorsque le voyou Calzada agressera violemment une petite vieille pour inciter les passagers à se soulager de leurs valeurs. Negra est une belle jeune femme, putain de son état, qui va connaître la misère sous le joug du gros mac et patron de bar Beltran. Quant à Atilio Guzman, caporal de marine, il a été témoin direct du putsch se préparant contre le président Juan Domingo Peron. Toutes ces personnes vont se croiser, vivre et souffrir dans l'ambiance précédant cet épisode tragique du 16 juin 1955...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Rodolfo Santulo, d'origine mexicaine, est déjà un peu connu des lecteurs français avec des scénarios aux Humanoïdes associés (Dengue 2015), une adaptation de Dracula chez Mosquito en 2019, et un bon polar en 2020 dans la collection Grindhouse de Glénat. C'est dans cet esprit noir et sarcastique qu'il a conçu des récits parus en album en 2014 en Argentine chez Historieteca ediciones. Dante Ginevra vient de ce pays et n'a été publié en album chez nous qu'à deux reprises depuis 2012, chez de petits éditeurs. Son style au trait hachuré, sombre et très nerveux, évidemment un peu daté par rapport aux belles planches au lavis de La malédiction de l'immortel parues depuis (Sarbacane 2018) convient cependant parfaitement aux petits chapitres imbriqués de ce polar coup de poing. Celui-ci décrit les méandres de la dure vie du peuple de la rue, pris entre la misère pure, les mafias locales, et les juntes militaires, dans un style génial, qui rappellera le meilleur de Carlos Trillo, Eduardo Russo, Munoz et Sampayo. Une relève du tonnerre qu’on n’aurait voulu manquer pour rien au monde, surtout dans le petit format comics broché de cette nouvelle collection Viva libre ! Remercions les éditions Ilatina pour cette découverte.
