L'histoire :
En mars 2020, Chloé est soignante dans un CMP. Elle partage sa vie avec son mari, professeur en collège et leurs deux enfants, étudiants tous les deux. Tandis que lui est obligé d’enseigner à distance à cause du premier confinement, elle essaye tant bien que mal d’assurer au mieux ses missions auprès des bénéficiaires. Mais entre les colocataires de leur immeuble laissant des mots anonymes dans leur boîte, leur demandant de respecter les distanciations « sachant ou elle travaille », les amendes pour être sorti chercher du chocolat, et toutes les privations sociales, culturelles et de moyens qui affectent le quotidien durant cette période, la vie devient vraiment dure. La volonté et l’abnégation de Chloé suffiront-elles ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
On ne se mentira pas en avouant que la lecture de ce témoignage fictionnel très bien documenté plombe un peu et ne motive qu'à moitié la lecture au départ. Se replonger dans ces mois Covid, et surtout ces moments de confinement, d'autant plus à hauteur de personnes travaillant dans le milieu enseignant et médical, a de quoi décourager. Et pourtant, des témoignages il en faut. Yann Madé a trouvé le ton juste pour raconter l'improbable crise ayant plongé des milliards d'humains dans une des pires expériences qu'ils aient eu à vivre. On a beau l'avoir personnellement vécue, il est difficile d'admettre que tout cela a pu exister. Et que pourtant « on » a tenu. Des gens payés habituellement pour aider d'autres gens, des fonctionnaires, ont dû coûte que coûte braver les difficultés, le manque criant de moyens, la résistance et jusqu'à la haine parfois de concitoyens, pour assurer la mission pour laquelle ils s'étaient engagés au départ. Une mission quasi impossible, superbement rendue ici, par le biais de personnages palpables, proches et attachants, parce que justement humains. Mais c'est aussi leur humanité pleine et entière qui les a abîmés au passage, comme bien d'autres français. Soignante a le mérite d'exister, afin que toutes celles et ceux qui n'ont pas connu cet intermède difficile puissent s'en faire une idée assez juste (superbes moments de rappel de ces contrôles d'autorisation de sortie, des cercueils évacués en nombre aux pieds des Ephad...). Et que ceux qui l'ont vécu puissent réaliser combien chacun a souffert. Sur la couverture aux couleurs de fin du monde, où trois personnes patientent dans une salle d'hôpital, chacun dans une position étrange, il est difficile de définir vraiment qui est le plus atteint. Tout le sujet du livre. Bravo.