L'histoire :
Comme chaque matin, à l’heure de partir à l’école – pour Clémence – et au boulot – pour sa mère – un checking des affaires à emporter dans le coffre de la voiture est fait, dans la bonne humeur. Dynamite, plastic, fusil d’assaut, munitions, grenades à fragmentation… c’est bon, tout y est. Car Clémence n’est pas issue d’une famille ordinaire. Elle suit d’ailleurs une formation très pointue pour devenir elle aussi un malfrat de haut vol. Cette école se tient dans une base secrète enterrée, à laquelle on accède via ce qui ressemble à un tuyau d’égouts perdu en pleine cambrousse. Trois règles de base sont à respecter : on ne vole qu’aux riches, on vole avec classe, on vole sans violence. Quand un élève y dérobe le portefeuille de son professeur à son insu, ce dernier le félicite ! Clémence est aussi douée lorsqu’il s’agit des travaux pratiques… mais elle est surtout futée, car elle parvient toujours à biaiser pour éviter de se donner trop de mal. Ses maîtres considèrent souvent cela comme de la triche, donc du vol, de l’entourloupe… donc c’est très bien noté ! Hélas, au grand dam de ses parents, le rêve de Clémence est de pouvoir intégrer une école normale, apprendre la géographie, la biologie…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Et si on prenait l’ordonnancement moral de notre civilisation à l’envers ? Et si la normalité c’était le larcin, si on encourageait le vol et le brigandage, si le braquage éblouissant était le graal de l’éducation parentale ? Ici scénariste, Maïa Mazaurette s’amuse à prendre le comportement normal en négatif, pour contexte de sa nouvelle série jeunesse. Or l’illégalité nécessite un peu d’entrainement et des principes rigides ; 3 lois sont donc émises, dès les pages de garde : on ne vole qu’aux riches, on vole avec classe, on vole sans violence. De tels principes ne tiennent – évidemment – pas la route (les enfants, merci de ne pas reproduire ce que vous lisez à la maison). Nous évoluons bien dans un univers jeunesse imaginaire, en partie destiné à faire s’insurger les enfants contre le mauvais exemple. Au dessin, Dagda, alias Céline Liégeois, présente un style personnel, dynamique et coloré à l’aide de teintes délavées. Expressifs, les personnages attachants s’animent au premier plan de décors sans contours de forme, au sein d’un découpage serré. Les situations humoristiques ne manquent pas, premièrement en raison de la contradiction entre la finalité malhonnête de cette famille et son organisation traditionnelle. La famille de Clémence est en effet un cliché : ils mangent à table, planifient leurs vacances, partent au boulot chaque matin… mais leur activité est le vol, car ils appartiennent à une guilde de bandits, au sein d’un monde contemporain normal. L’humour découle aussi de la transgression ultime de Clémence qui, dans ce contexte, rêve d’être honnête ! Et tandis que nous suivons les études et les examens de brigandage de Clémence, des amitiés contre-nature se nouent, un mystère plane concernant la mère, comme éléments fondateurs d’un second tome que nous suivrons avec plaisir.