L'histoire :
Hitchcock et Nicolaas sont deux sud-africains d'aujourd'hui. Pour échapper à l'ennui ou à la solitude, ils boivent des binouzes et sniffent quelques rails de coke de temps à autre. Mais ils se remémorent aussi des histoires d'antan impliquant des petits bandits auxquels ils s'identifient. Tel ce fait divers évoquant la bande à Foster, malfrats devenus ennemis publics numéros 1 en 1914... L'histoire est simple, elle ressemble un peu à celle de la bande à Bonnot : après vols dans des banques, trafic d'alcool, meurtres et petits larcins, Maxim et Mezar Foster sont traqués par la police. A l'époque, l'histoire avait fasciné presse, public et police qui, a grands renforts de moyens, tentait de leur mettre le grappin dessus. Le pouvoir à l'œuvre en Afrique du Sud, couplé à un barnum médiatique, cela donne un mélange de fascination et d'impuissance, de bavures et d'abus, de vice et de corruption, pour une poursuite qui ne peut s'achever que par la tragédie...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En France, on avait pu découvrir Conrad Botes à travers le collectif Bitterkomix, un groupe d'auteurs sud-africains dont L'Association avait publié une anthologie en 2009. L'Association édite cette fois-ci la Bande à Foster, récit que l'on peut lire à un double niveau : une histoire sanglante de malfrats, qui a la valeur d'une fresque historique sur l'Afrique du Sud contemporaine. Au-delà de l'histoire fantasmée de bandits sans envergure, la BD donne surtout à voir en creux le présent d'un pays vicié et nourri de désespoir. Les auteurs y interrogent évidemment la réalité afrikaner, le racisme, le pouvoir et la corruption d'une société déboussolée. La BD révèle alors la face sombre de l'Afrique du Sud, loin de l'histoire mythifiée et des représentations flatteuses. Ainsi, pour échapper à leur triste quotidien, les deux figurants ont non seulement recours au fantasme, à l'idéalisation de cette bande de petits bandits d'antan, mais aussi aux drogues et à l'alcool. Dure et violente réalité. Quant au trait épais en noir et blanc, puissant et sombre, il vient souligner avec subtilité la souffrance d'un pays à la recherche de son identité. Sous des faux airs gentillets et romantiques, s'appuyant sur des coupures de presse d'époque, les auteurs parlent en fait d'une société violente et sans pitié pour les faibles, témoignant ainsi d'un pays qui, malgré les progrès accomplis, reste encore un grand chantier politique et social. Une histoire sombre et cruelle qui sonne comme la critique politique d'un pays sans repères. A lire.