L'histoire :
Après avoir œuvré en tant que journaliste BD sur différents supports, le passionné de 9ème art qu’est Vincent Henry fonde en 2003 une petite maison d’édition, la Boîte à Bulles. L’un des premiers bouquins publiés est Derfal le magnifique, réalisé par José Roosevelt. C’est tout à la fois penaud et extatique qu’il le présente à un journaliste BD… conquis par la force de persuasion du jeune éditeur. A la même période, la BAB (comme on l’abrège affectueusement) publie aussi Le cabinet chinois de Nancy Peña et l’Immeuble d’en face de Vanyda, une jeune artiste prometteuse découverte par le biais d’un fanzine. Il a décelé chez cette dernière un très fort potentiel, alors que la jeune femme n’a que 25 ans. Puis c’est devant un auditoire (fictif ?) du festival d’Angoulême et accompagné par un canard mime que Vincent nous présente un troisième bouquin en janvier 2004, Fille perdue, de Nabiel Kanan. Comme à chaque fois, il ne tarit pas d’éloges sur les capacités de cet auteur à faire vivre ses personnages, à transmettre l’émotion. En mars 2004, vient Un automne à Hanoi, du minutieux Clément Baloup, le premier album en couleurs pour une nouvelle collection, Champ libre…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Vu le contexte éditorial étriqué, ça n’était pas gagné d’avance… mais la Boîte à Bulle vient bien de fêter ses 10 ans ! A cette occasion, le fondateur et moteur de la structure éditoriale, Vincent Henry, a scénarisé 46 souvenirs de publications, en autant de planches mises en cases par des auteurs-maison. Partiellement déjà publiées en 2003 et 2004 (les 11 premières pages), ces historiettes sont recueillies en un fascicule souple (et bon-marché : 2 euros !), plus proche de l’hommage truffé de caméos que du biopic grand-public. En effet, à chaque historiette, un album est donné en titre et son contexte de publication est mis en exergue par un auteur tiers, avec son style propre, pour des rendus variables… mais de styles graphiques globalement jetés ou « modernes ». Ces focus ne cherchent pas vraiment à s’inspirer du fonds, ni de la forme desdits ouvrages et ils ambitionnent nulle virtuosité technique. Il s’agit avant tout de mettre en scène Vincent Henry lui-même dans un quotidien peu spectaculaire : face à ses euphories, ses succès, ses doutes du moment. Le recueil est donc nombriliste par définition, mais il offre surtout une incomparable vision immersive dans le monde de l’édition. On salue alors la prouesse qui est sienne, de continuer à faire tourner bénévolement une telle structure, tout juste rentable pour payer une salariée (actuellement Jordane, attachée de presse et femme à tout faire) et un fidèle maquettiste (Vincent Rioult). En ce sens, cet ouvrage sans prétention est riche d’enseignements et apporte une pierre d’un autre genre au panorama du 9ème art.