L'histoire :
L’hiver 2012, deux potes, Olivier et Nicolas, font une sorte de randonnée-souvenir sur une colline enneigée. Ils grimpent ainsi jusqu’aux vestiges de la cabane qu’ils ont construit dix ans auparavant. Ils ont donné rendez-vous à ce point précis à leur ex-pote Benjamin, qui vient juste de sortir de taule après dix années d’incarcération. Mais avant cela, ils creusent le sol à un point précis et retrouvent les deux choses qu’ils ont jadis enterrées : une bouteille de gnole encore pleine et un sac de fric contenant 5860 euros. En dix ans, ils se sont en effet permis de ponctionner chacun leur part… ne laissant que cette somme à Benjamin, qui a écopé d’une lourde peine pour tout le monde, sans moufter. Puis ils s’assoient, attendent et discutent de ce qu’il s’est passé 10 ans auparavant, ignorant que Benjamin est déjà là, pas très loin, pour les espionner. En 2002, Benjamin et eux se retrouvaient régulièrement à cette cabane isolée pour picoler et fumer des joints. Pour usage prohibé de cannabis, Benjamin s’était déjà fait viré du bahut et il avait trouvé un plan foireux pour rebondir. En effet, l’oncle d’un autre ami, Johnny, venait de lui proposer de devenir dealer. Car Johnny avait utilisé un de ses hangars désaffectés pour réaliser son rêve : une serre gigantesque dédiée à la culture de plans de cannabis…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Bruel chanterait : « On s’était dit rendez-vous dans 10 ans »… Après l’incarcération d’un des trois amis de cette histoire tout à fait réaliste, l’heure des comptes est venue. Au pied de La cabane du titre, qui est leur QG secret de gamins, ils font une randonnée nostalgique et se remémorent les détails de l’histoire qui les a menés là, offrant au scénariste l’occasion de faire un ping-pong narratif entre présent et flashbacks. Y-a-t-il eu entourloupe ? Y-aura-t-il vengeance ? Vous ne le saurez qu’à la toute fin, après avoir découvert progressivement, au gré d’un suspens léger mais permanent, les tenants et les aboutissants de leur affaire. Il y a eu des morts, il y a du fric en jeu, il y en a un qui a morflé pour les autres… Il y a donc de quoi être tendu avec ce scénario ultra-réaliste signé Benjamin Fischer – tiens donc, le même prénom que l’un des héros… faut-il y voir un lien autobiographique ? Outre l’atmosphère sociale miséreuse parfaitement rendue, outre la juste peinture d’une amitié délitée comme le temps en impose à chacun, Fischer réussit son scénario parce qu’il n’essaie jamais d’être artificiellement spectaculaire et laisse apparaître les éléments avec une lenteur maîtrisée. Au dessin stylisé, Stibane utilise un trait gras, pas très loin de celui de Tronchet, par exemple, toujours parfaitement explicite. Avec ce one-shot en forme de thriller psychologique, la Boîte à Bulle commence donc plutôt bien l’année 2015…