L'histoire :
Fin avril 1994, Rwanda, près de Gitarama. La petite Alice ne quitte pas ses deux sœurs jumelles, Aline et Adeline, qui ont trois ans. Cela fait quelques temps qu'elle trouve que les adultes se comportent d'une façon étrange. Ils parlent tout bas et le soir, ils écoutent la radio. Un jour, avec ses sœurs et un oncle qui a le même âge qu'elle, elle va chercher, comme d'habitude, des cousins. Arrivés sur le grand chemin, les enfants voient deux adultes en frapper un troisième, à terre. Un grand bâton s'abat sur sa poitrine. Alice demande alors ce que cet homme a fait pour être battu comme ça. Celui qui tient le gourdin lui répond que c'est très simple, il s'agit d'un Inyenzi, autrement dit un cafard de Tutssi. Après ces évènements, l'ambiance s'alourdit. L'homme battu a été retrouvé mort. Alice imagine qu'ils l'ont laissé là où il l'ont tué... et elle ne repassera plus jamais par cet endroit...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cela n'a rien du hasard si ce livre a été primé par Médecins Sans Frontières aux Rendez-vous du Carnet de voyages de Clermont-Ferrand, car Le grand voyage d'Alice est un récit touchant. Celui d'une petite fille qui a survécu au génocide rwandais. C'est un livre qui vous prend aux tripes. Gaspard Talemasse retrace l'histoire de cette enfant qui ne cesse de fuir la mort. Pour cela, le récit adopte la première personne, ce qui fait qu'on est témoin des évènements avec les yeux de cet enfant. A travers son parcours, 2000 kilomètres, d'innombrables jours d'exode, l'auteur a choisi de ne mettre en scène que ce dont se souvient l'enfant, ce qu'elle a perçu, ressenti, lors de la situation. La peur, l'épuisement, la maladie (pensez-donc, elle a survécu à une pneumonie et la malaria en même temps), les bêtes sauvages la nuit, les militaires à ses trousses, la terreur, la séparation... on imagine par où est passée la petite Alice et avec elle, c'est l'horreur de la guerre qui est dépeinte. Le trait rond, comme les yeux en forme de billes de ces gosses en exil et les couleurs aquarellées amènent de la lumière sur ce récit bouleversant, le visuel venant ainsi balancer avec la dureté des évènements décrits, de mars 1994 à avril 2003... En fin d'album, l'auteur donne aussi la parole à la mère d'Alice, elle aussi rescapée. Voici une BD magnifique qui parle de l'effroyable.