L'histoire :
Revenu de la guerre en ex-Yougoslavie, Sam se cherche une identité, des potes, une raison de vivre. Il atterrit alors dans le milieu des skinheads... Lendemain de fête à Bordeaux, studio du Dolmen, 10 heures du matin. Sam émerge lentement du brouillard, la faute à une soirée bien arrosée. Très vite, la réalité le rattrape : Un pote de Romain, au téléphone, le réveille et lui demande d'aller faire une déposition au commissariat. Son camarade est accusé de la mort d'un homme, la soirée, transformée en pugilat a fini par mal tourner. Sam raconte alors son parcours au milieu des skins, des fachos et des jeunes désœuvrés, entre manifs du FN, soirées bitures, bagarres nécessaires et transferts au poste de police. Jusqu'au jour où Sam prend conscience de la fin du voyage, le temps de changer de vie... Rebelle sans l'être tout à fait et pas vraiment un facho dans l'âme, Sam peine à trouver sa place mais n'hésite pas à jouer la provoc' ou faire le coup de poing, comme tout le monde, en ciblant des bouc-émissaires de circonstance : l'étranger, le coco, le joueur de djembé... L'histoire d'un gâchis, d'une descente aux enfers, pour tout reconstruire.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans un récit autobiographique nourri d'une trajectoire tortueuse, l'auteur David Cenou revient sur son passé de skinhead, l'époque où la boule à zéro, le Bomber sur le dos et les Doc Martens aux pieds, il faisait le coup de poing. Ses cibles alors : rastas, joueurs de djembé, cocos... Aux concerts, dans la rue ou dans les bars, sur des aires d'autoroutes, dans les manifs du FN, à grand renfort de houblon, il se cherche une identité, des compagnons de route, une raison de vivre illusoire, puis enchaîne les conneries jusqu'à ce jour fatidique où la mort d'un homme le jettera en prison. Frontalement, sans juger et avec sincérité, l'auteur expose, raconte, décrit et... finit par ennuyer. Car outre l'évocation intéressante d'un microcosme néo-nazi peu familier au plus grand nombre, il ne nous est pas donné grand chose à voir ou comprendre, sinon la descente aux enfers d'un jeune paumé, bien dépassé, revenu d'une guerre en ex-Yougoslavie. L'auteur aurait pu éviter l'écueil de l'anecdote en prolongeant le récit par une réflexion tirée de son expérience, manière de prendre du recul sur ce passé en trompe-l’œil. Or cette analyse n'arrive jamais, tout juste quelques mots en fin d'ouvrage sur l'errance d'un gars sans repères, en quête d'identité et de valeurs (« Tu vas me dire que t'es devenu skin par conviction politique ? Tu y crois vraiment ? On avait aucune conscience politique, juste des postures, rien de plus, un grand vide »). De même, quel intérêt de présenter les photos de ses anciens camarades d'extrême-droite dans les pages de fin ? Où l'auteur souhaite-t-il en venir ? Graphiquement ni virtuose, ni désagréable mais passe-partout, le trait manque de personnalité. Rien d'étonnant pour une première BD. Reste finalement une autobiographie factuelle qui manque son sujet, où l'on comprend bien la dimension cathartique de la démarche, mais qui enfile, hélas, les anecdotes ronronnantes. Dommage.