L'histoire :
Une famille élargie vit en communauté dans une grande propriété de la Russie des Tsars. Alexandre Vladimirovitch Sérébriakov, vieux professeur retraité, habite ici en compagnie de sa très belle seconde femme, Elena Andreievna, 27 ans. Ils cohabitent avec la mère de la première femme du professeur, Maria Vassilievna Voïnitskaïa, sa fille Sofia Alexandrovna et son frère Ivan Petrovitch, que tout le monde appelle Oncle Vania. Au quotidien, on croise encore dans la demeure Marina, une vieille nourrice, Ilia Ilitch Teleguine, un propriétaire foncier ruiné et Mikhaïl Lvovitch, médecin. Tout ce petit monde passe des journées relativement oisives, à se saouler, à pique-niquer, à se regarder en chiens de faïence, notamment parce que des passions secrètes les nourrissent. Entre autre, oncle Vania crève d’amour pour Elena… qui elle, ne ressent rien pour lui. Sofia, elle, est amoureuse du médecin Mikhaïl et elle tente diverses approches pour sonder la réciprocité de ses sentiments. Les deux femmes, qui ont à peu près le même âge, se confient l’une à l’autre. Pendant ce temps, la campagne environnante se transforme, la nature s’amoindrit, en raison de la belle modernité galopante. Un jour, le professeur annonce qu’il a décidé de vendre la propriété… qui ne lui appartient pas, précisément…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Rémy Benjamin fait ici une adaptation assez fidèle de la pièce Oncle Vania d’Anton Tchekhov, dramaturge russe du XIXème siècle. Il tente de la transcrire à travers le prisme d’une des thématiques lointaines de l’œuvre : l’écologie. Car aux alentours d’une petite communauté qui vit en autarcie sur une riche propriété, la nature se transforme sous l’effet de la mise en place de l’agriculture intensive. Mais ce sujet n’est en réalité qu’un petit détail du réel propos de l’œuvre : les marivaudages croisés et complexes entre des personnages qui brulent tous plus ou moins de passions les uns pour les autres… sans réciprocité… ce qui restreint quelque peu les passages à l’acte, mais accroît les déclarations enflammées et les frustrations dramatiques. Le huis clos de la propriété correspond au principe de la pièce de théâtre, ici fidèlement adaptée, et c’est fort louable. Mais il faut reconnaître que les manœuvres romantiques de ces nantis russes passionnés, durant 144 pages d’un découpage en gaufrier serré, sont trèèèès redondantes, laborieuses, surannées et un peu ridicules, à notre époque. On peut toutefois lire cette œuvre par le prisme métaphorique d’une humanité qui ne parvient plus à discuter et à s’aimer, tandis qu’elle travaille à sa propre perte en ravageant son monde. La couverture crépusculaire, avec oncle Vania suicidaire au bord d’une inondation, symbolise bien cette tonalité désespérée.