L'histoire :
Septembre 1948, en Palestine, des gamins tournent autour d’une jeep de patrouille militaire. Les quatre soldats qui l’occupent ne tiennent pas à être dérangés et le font clairement savoir aux deux petits curieux qui ne s’attardent pas. Dans la jeep, on s’impatiente. Le convoi du comte devrait être passé, or toujours rien en vue. Alors qu’ils mettent en place des bidons au milieu de la chaussée pour barrer la route aux véhicules, un des soldats demande à un autre s’il est vrai que celui-ci a connu Yair en personne. Oui répond l’autre « j’étais même à ses côtés quand il a abandonné l’Irgoun pour créer le Léhi ». Son interlocuteur aimerait savoir comment tout a commencé. Tel Aviv 1938, Avner est un jeune homme qui s’engage pour la cause juive, recruté par Michaël, le futur Yitzhak Shamir, pour l’Irgoun Zvaï Leoumi, afin de lutter contre je joug britannique et la population arabe qui voit d’un mauvais œil la présence juive grandissante en Palestine. Il assiste ainsi aux premiers attentats meurtriers de la région. La Haganah, autre groupe sioniste, prône la retenue quant aux prises de position vis à vis des anglais et de la Palestine. Devant les hésitations des anglais à créer un état d’Israel, Yair, le leader du groupe d’Avner, décide de créer une branche plus radicale, qui deviendra à terme le Lehi, après avoir fait montre de la plus grande fermeté et violence à l’égard des ennemis du groupe, quels qu’ils soient.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Davantage qu’une bande dessinée documentaire, Stern Gang est un témoignage vu de l’intérieur, d’une époque méconnue et pourtant essentielle de l’histoire juive. Plus que la forme, graphique et parfois brouillonne, c’est le fond qui fait l’intérêt de cet ouvrage. En racontant la périlleuse aventure d’un jeune sioniste engagé et courageux, dans cette époque charnière du Moyen Orient, Luca Enoch prend le pari d’éclairer cette période opaque de l’Histoire internationale. On y découvre un univers rude et des personnages engagés à-la-vie-à-la-mort pour leurs convictions. Leur histoire est passionnante du fait qu’elle est héroïque par certains côtés, injustes par d’autres et essentielle pour eux. La complexité des relations humaines et internationales apparait clairement au cours du récit, les enjeux pour les juifs sont si importants qu’ils ne peuvent se permettre de s’en remettre à la SDN d’abord et à l’ONU ensuite. C’est par eux que naîtra Israël, dans la douleur. En optant pour le noir et blanc, Claudio Stassi renforce la dureté du récit à travers des personnages aux regards intenses et aux traits soucieux. Malgré de légères imprécisions parfois, sa composition reflète bien l’atmosphère pesante de la période. A la fin de l’ouvrage, le glossaire, Le groupe Stern par Claudio Vercelli et Les lacunes de l’histoire par Luca Enoch ponctuent l’album en apportant des précisions qui éclairent davantage ce vaste sujet, trop méconnu dans ses origines. Avec un thème ambitieux et une attention qui ne l’est pas moins, Enoch et Stassi livrent une leçon d’Histoire qui résonne encore de nos jours. Le conflit israëlo-palestinien en est le témoin indéniable.