L'histoire :
Hippolyte habite Ouagadougou. Tout le monde l'appelle Kirikou car il est acteur. Tout commence par une blague, comme souvent là-bas, comme toujours dans sa vie. En passant devant le Yenenga, le bar où il prend des bières (son maquis, comme on dit dans le pays), il est invité à boire un coup par le frère d'une de ses copines de classe. Les gars sont sympas et font partie d'une troupe. Très vite, on lui pose la question de savoir s'il a déjà fait du théâtre. Hamidou, un des leurs, est malade et ils ont besoin de le remplacer. Hippo accepte. D'abord parce qu'il a besoin d'argent ; et après, par curiosité. Alors depuis, il continue à jouer les rôles de petit, de rabougris, de pauvre, de maigre, de souffre-douleur, d'où son surnom. Il a l'espoir qu'on finisse par lui donner le rôle d'un jeune séducteur ou de chef de famille. Ce jour-là, il sirote une Brakina, la bière brassée au pays, entouré de ses potes, quand débarque Adjaratou, une beauté somptueuse dont il tombe immédiatement raide dingue. Lui est Mossi, elle est Samo, deux ethnies parents à plaisanterie. Alors elle le traite d'esclave et lui d'âne et lui annonce qu'il va lui monter sur le dos ! Mais la fille répond qu'elle est trop chère pour lui : un million de francs CFA (1500 €) et il a une semaine pour réunir la somme...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Il y a des albums qui vous font du bien. Parce qu'ils véhiculent la joie, parce qu'ils vous confrontent à l'altérité, parce qu'ils vous font voyager et vous immergent dans un quotidien qui diffère beaucoup du nôtre. Ting Tang Sap Sap s'inscrit dans ce registre et propose cette expérience de lecture. C'est une histoire simple et belle, à l'image de la rencontre entre Hippo et Adajratou. Et quel domaine plus pertinent que l'Amour pour relater les mœurs ? Les auteurs ont pour eux d'être familiarisés avec le Burkina Faso ; les personnages qu'ils mettent en scène sont les reflets fictifs de burkinabés qu'ils connaissent personnellement. Ainsi, à travers la sympathique success story à laquelle Hyppolite est condamné s'il veut pouvoir briller aux yeux de sa douce, c'est le quotidien des Ouagalais qui est décrit. Ici, le rapport au temps, à l'argent et tout simplement aux autres est totalement différent de ce qui régit nos relations sociales. Anaëlle Hermans souligne d'ailleurs intelligemment les liens qui existent entre les ethnies, en particulier la notion de « parent à plaisanterie », qui autorise ceux qui en bénéficient à s'insulter ! Le recours à la voix-off amplifie également le sentiment de proximité, voire l'identification à ce jeune homme débrouillard et motivé comme jamais par les doux yeux de cette Samo, quand lui est Mossi. Louis-Marie Colon et Benjamin Vinck se partagent le travail graphique, avec des planches simples, toujours lisibles et découpées façon gaufrier. Ils ont soigné les décors, si bien qu'on a le très agréable sentiment de lire une BD aux accents de carnet de voyage, sans que cela ne soit préjudiciable au rythme. Enfin, « Ting tang » veut dire en dialecte local « la débrouille », et « sap sap » signifie « vite ». Alors débrouillez-vous comme vous pouvez et faites l'acquisition, vite, vite, de cet album réjouissant !