L'histoire :
A Vincennes, le 15 juillet 1927. Nestor Makhno et Galina Kouzmenko sont deux libertaires Ukrainiens. Ils vivent désormais en France, avec leur fille de 6 ans, Yelena, née dans un camp de détention en Pologne. Victor est le fondateur l'Armée Révolutionnaire Insurrectionnelle Ukrainienne, qu'il dirigée, toujours en première ligne, de 1917 à 1921. Sa femme est institutrice ; elle était en charge de l'éducation dans cette armée, surnommée la Maknovchtchina. Ils accueillent ce soir d'autres illustres anarchistes. Parmie eux, Yacob Dubinsky, qui les connaît très bien, puisqu'il est militant ukrainien, qu'il a épousé leur cause et fut combattant de la Maknovchtchina. Buenaventura Durruti est une des principales figures de l'anarchisme espagnol. Émilienne Morin est la plus jeune de cette réunion. Elle est active au sein des jeunesses syndicalistes. Louis Lecoin est sans doute le plus connu des anarchistes français. Il a passé plusieurs années en prison, parce qu'il était pacifiste au moment où la Première Guerre Mondiale a éclaté. Francisco Ascaso est aussi espagnol et militant anarcho-syndicaliste, membre de la Confederacion Nacional del Trabajo. Quant à Berthe Fader, elle est responsable de la Librairie Internationale Anarchiste de Paris.Tous échangent à propos de l'émancipation des peuples...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
On commence fort logiquement cette seconde partie là où on avait laissé les personnages dans le tome précédent, c'est à dire dans le salon de Nestor Makhno er Galina Kouzmenko, entourés de leurs amis anarchistes et/ou libertaires. Ainsi, les échanges de souvenirs ainsi que leurs débats sont l'occasion pour Bruno Loth de se pencher sur une partie de l'Histoire généralement escamotée par le programme scolaire. On en apprend beaucoup et le récit qui s'égraine à travers la parole des uns et des autres est tout sauf fictif. Maintenant que le régime communiste de l'ex URSS s'est écroulé, il est particulièrement intéressant de revenir à la tentative (avortée) de fonder une nation, en l’occurrence l'Ukraine, sur la base d'une doctrine politique collectiviste, mais qui écarte toute possibilité d'une caste dirigeante s'arrogeant le pouvoir. Certes, il y a le lourd tribut de tant de morts... et ce second volume n'épargne pas le lecteur quand il remet en perspective les massacres des familles des « insurgés », comme en pâtit Makhno, ou la violence qu'il exerça en retour... Mais au-delà du fait qu'on adhère ou pas aux idées de ces anarchistes dans un monde qui nous ramène un siècle en arrière, on ne peut s'empêcher de réfléchir à l'existence persistante d'une classe sociale qui continue à dominer notre société qui, elle, n'a rien de communiste ! Alors si on revient au fil de cette histoire dans l'Histoire, on s'aperçoit aussi la somme de travail de recherches et de documentation qu'elle a du nécessiter. D'ailleurs, la carte qui ouvre ce volume et qui reprend une partie des évènements ukrainiens en est un indicateur, tout comme l'est le parcours reconstitué de Durruti. Avec lui, c'est l'Espagne et l'Amérique du Sud qui sont évoquées. Cuba, le Mexique et des braquages de banques, conçus comme des opérations d'expropriation du capital ! C'est un récit truffé d'anecdotes que nous livre Bruno Loth, mais surtout très précis sur les faits, si bien qu'on en apprend énormément. La rondeur du dessin offre un joli contraste avec quelques scènes impressionnantes, celles qui se rapportent à la guerre que Makhno a livrée pour son pays, quand Corentin Loth alterne les couleurs sombres, ocres et sang pour les flashbacks et bleu pacifié pour les scènes à Paris, où les uns et les autres échangent leurs souvenirs en se baladant. Un second tome à la hauteur du premier, voire plus dense. C'est dire si il est remarquable !