L'histoire :
Jean-Philippe, pharmacien, moustache et barbe à la Karl Marx, lunettes d’intello, 39 ans et toujours célibataire. Il aime pourtant le cinéma, les voyages, les peintres impressionnistes et les fameuses sorties entre amis. Et en plus, l’amitié est vraiment quelque chose d’important pour lui. Avec un profil aussi original sur les sites de rencontre, il devrait pourtant trouver l’âme sœur : drôle, gentille, belle et aimant faire l’amour toute la journée. Encore seul à Noël, il part à la chasse aux meufs sur le web : nuagette à des oreilles de Mickey, Pierre-Licorne ressemble à une ombre et Ninon72 doit être sarthoise. La dernière est la plus mignonne, il choisit Ninon. Sauf que voilà, notre JP national est incapable d’engager la conversation, les premiers mots sont toujours les plus absurdes. Après lui avoir avoué qu’elle cuisinait à la perfection les pâtes carbonara et que sa région était magnifique, il lui répond : « tu as bien raison, la Normandie est réellement une superbe région ». Difficile d’être plus loser… Mais de Flers à Caen, de Jullouville au Mans, JP est tenace, il sait que la chance va tourner. On ne sait jamais, sur un malentendu, ça peut toujours marcher… En attendant, c’est Champagne et chapon chez les parents pour Noël.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les auteurs, Monsieur le Chien et Manu Delente, abordent ici les thèmes de la solitude et de la misère affective par le biais de l’humour caustique. Pour anti-héros, Jean-Philippe, un loser magnifique très attachant et un peu obsédé. Pas très beau mais aux revenus fixes, il galère à se trouver la femme d’une vie. Et c’est bien connu, « on chope bizarrement plus en étant marié ». De vents en chat' sur le net, d’expériences avortées en coups d’un soir, JP avance avec l’énergie du désespoir sans jamais penser que la réussite persistera à le fuir. Touchant ou pathétique, féroce ou drôle, JP est le genre de personne qu’on aime pour ses faiblesses et ses défauts, le type d’être humain trop humain. Avec un sens de la réplique qui fait souvent mouche, un rythme vif et un peu d’autodérision, les auteurs réussissent à nous faire marrer sans éluder une forme de gravité. Pauvre JP qui tentera l’improbable le premier soir avec une fille qu’il croyait chaude comme la braise ; ou au Mans, la rencontre avec la fameuse Ninon dont aucune n’étincelle ne jaillira. Sans perdre son humour et son spleen de circonstance, JP finira tout de même par retomber sur ses pieds dans cette chronique de milieu de vie plutôt drôle et touchante, parfois cruelle. Qui sonne d'ailleurs comme l’expérience d’un échec, commune à beaucoup et très dans l'air du temps. Quelque part entre Michel Houellebecq et les Bronzés, les auteurs signent là une aventure sociale mordante et désenchantée, made in Normandie. Bien joué !
