L'histoire :
Né en 1891 au sein d’une famille de fermiers de Poor Valley en Virginie, A.P. Carter montra très vite des dispositions étonnantes pour la musique. Comme son père, il apprit seul à jouer du violon – cet instrument du diable comme disait sa maman – et aimait chanter de vieilles chansons entendues de bouche à oreille. Afin de ne pas les oublier, l’habitude lui vint très tôt de les coucher sur papier. Et c’est ainsi que, au travers des voyages qu’il fit pour son premier travail salarié chez un pépiniériste, il écoutait les gens qu’il rencontrait chanter et leur demandait l’autorisation de prendre en note leurs paroles. Un jour, c’est à la fenêtre d’une maison de Rich Valley qu’il entendit une voix enchanteresse. La jeune Sara Dougherty, une lointaine cousine, venait de lui ravir son cœur. Mauvais vendeur, sur le chemin retour, il décida de planter l’arbre fruitier qu’il transportait. De cet arbre naîtraient beaucoup de fruits, se dit-il. Conquis l’un et l’autre par leurs talents musicaux réciproques, ils se marièrent. Pour s’échapper un peu d’un quotidien matériel difficile, le couple forma un groupe, auquel se joignit la petite cousine de Sara, Maybelle prodigieusement douée à la guitare. Rapidement repérés à l’occasion de leurs prestations diverses, l’enregistrement d’un premier disque ne donna rien, jusqu’à la venue d’un certain Ralph Peer, producteur de la maison Victor…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Qui en France connaît la famille Carter ? Si l’on devine à la lecture des quelques mots d’introduction des auteurs que peu d’Américains les connaissent nommément aujourd’hui, alors imaginez combien de Français peuvent avoir entendu parler d’A.P. Carter et de sa famille ! Pourtant, au fil des pages, il apparaît évident qu’ils font partie de la légende de la country musique, jusqu’à ce clin d’œil du destin qui fit de June Carter la muse de Johnny Cash (que l’on ne présente plus depuis l’excellent film Walk the line). Commencé en 2007 pour n’être achevé qu’en 2011, Don’t forget this song est le fruit d’un long travail de Mémoire et de composition, entrepris à quatre mains par David Lasky et Franck Young, dont le graphisme se succède à mi-parcours, environ, des quelques 192 pages de ce roman graphique. Ecrit sur les bases d’entretiens, témoignages, archives écrites et musicales, etc. l’intrigue suit un déroulement chronologique permettant de ne pas perdre inutilement le néophyte en manque de repère. De la table des matières à la dernière apparition d’A.P. Carter, les titres et les mélodies des chansons que lui, sa femme, sa cousine ou ses enfants ont recueilli, rythment inlassablement un ensemble qui, d’abord austère, se révèle agréable et invite, au final, à redécouvrir cet univers de « oldies » méconnus. Récompensé aux Eisner Award 2013, ce roman graphique intéressera naturellement au plus haut point les fans. Les autres pourront y jeter aussi un coup d’œil, tant la vie d’A.P. Carter est exemplaire, à la fois en tant qu’homme et père, à une époque de guerres et de – grande – dépression, qu’en tant qu’artiste compilateur et précurseur, véritable trait d’union entre la tradition orale d’autrefois et la modernité de nos divers supports médias (enregistrements, radio…).