L'histoire :
« La mer, comme le cœur de l'homme, est remplie de secrets. Mais l'homme, quand son cœur déborde, peut prendre la plume et, sur la plage d'une page, jeter ceux qui lui pèsent trop. On apprend à raconter des histoires comme on apprend à nager. Pour ne pas se noyer. » Comment fait la mer pour raconter ses malheurs ? La baleine millénaire qui vit au fond de l'océan, a régulièrement de la visite, car derrière son sourire se cache un trésor. Ses fanons protègent en effet la plus grande bibliothèque des mers. Exceptionnellement, à l'occasion, elle en fait la lecture. Sur l'océan, se trouve parfois un facteur de la poste maritime allant faire son travail, laissant sa tendre aimée à la maison. Mais un jour, le cétacé en remontant à la surface percute le petit bateau du facteur. Et vlan, le voilà à l'eau. Quand on oublie de porter ses lunettes, de tels accidents surviennent. C'est une belle occasion pour apprendre à se connaître et sympathiser. Surtout que la baleine, très aimable, raccompagne le jeune homme à la terre ferme, tout en lui racontant de fabuleux récits du fond des eaux. Puis un jeu de question/réponse rapproche ces deux êtres si différents tout en créant un lien spécial. Avant de se quitter, l'animal prête un livre peu anodin à son nouvel ami. « C'est l'histoire d'une sirène qui tombe amoureux d'une pirate ». Un ouvrage qu'il dévore avec sa chère et tendre, très enceinte, un peu plus tard. Il faut repartir à un moment quand même ! Dépôt de courrier sur un bateau, sur un phare...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
On finit totalement tourneboulé(e) par cette jolie découverte. Une nouvelle fois, Zidrou nous émerveille de son talent de conteur. Nous voilà spectateurs de la rencontre extraordinaire d'une baleine et d'un facteur des mers. Et pas n'importe quelle baleine : une passionnée de lecture qui a à disposition dans son corps toute une bibliothèque pour ravir l'ensemble des lecteurs. Cette image en soi n'était-elle pas déjà de toute beauté ? On tombe en amour devant ces êtres qui se rencontrent et s'apprécient. La baleine, animal étrange et fascinant, tâche de se cacher aux yeux des chasseurs sans cœur et sans pitié. Hélas, l'animal se fait capturer et meurt pour le profit des hommes. Quel choc pour le lecteur qui n'espérait que de la tendresse. Toutefois sa mort apporte de la poésie car les milliers de livres qu'elle hébergeait sont rejetés à la mer, tels des déchets. Impossible de rester insensible face à ce traitement inhumain de chasse à la baleine – qui continue encore de nos jours. Et aussi de ces êtres qui ne voient en l'animal qu'un moyen de gagner de l'argent. Des pays possèdent des droits spécifiques pour encore la chasser, ce qui contribue à la disparition d'animaux exceptionnels. Faudra t-il les laisser en paix quand il n'en restera plus assez pour la reproduction ? On a une folle envie de les protéger pour éviter qu'elles ne restent que des récits ou des squelettes dans les musées. Le scénario est amené avec beaucoup de douceur, de délicatesse et d'amour. Au dessin, Judith Vanistendael nous plonge dans cet incroyable récit touchant, faisant la part-belle à la couleur bleu qui nous immerge aux côté de la nature et des héros, là où le dessin lui laisse la place. Certaines scènes donnent l'impression d'un hommage à Jules Vernes et à 20 000 lieues sous les mers. Surtout celle où le facteur rentre dans la baleine pour trouver un livre, comme à l'intérieurs du Nautilus. Cette coopération réussie touchera le cœur de tout un chacun et donnera aussi l'envie de lire et de partager la lecture.