L'histoire :
A Londres, en 1888, une jeune femme surprend Jack l’éventreur la main dans le sac, juste après qu’il ait commis un crime effroyable. Elle le tue d’un coup de machette. De nos jours, à Paris, un cambrioleur professionnel en pleine besogne est dénoncé par un coup de fil anonyme et échappe de peu aux policiers. Quand il retrouve son commanditaire, ce dernier l’endort à l’aide d’une seringue hypodermique. A Rome, en l’an 40, la même jeune femme qui a tué Jack the ripper prend un déjeuner frugal aux côtés de l’empereur Caligula. Ecœurée par la cruauté de ce dernier, elle le pousse dans son bassin empli de murènes devant son entourage ! Elle se sauve en flinguant tout le monde alentours… A nouveau de nos jours en Sicile, un mafioso horticole exécute deux membres d’une famille concurrente dans sa serre… avant de se prendre lui aussi une seringue hypodermique. Enfin, à Hong-Kong, une tueuse à gage asiatique exécute un dernier contrat avant elle aussi d’être endormie par une seringue. Elle, le mafioso et le cambrioleur se réveillent prisonniers d’une belle demeure isolée sur une île. Là, un jeune paralytique visiblement très savant, fait les présentations au milieu d’un curieux laboratoire. Il leur explique qu’il va les envoyer voyager dans le temps et que leurs compétences particulières vont être très précieuses. Il s’agit pour eux de récupérer son ancienne gouvernante, devenue psychopathe : au contact de son invention permettant le voyage spatio-temporel, elle a décidé de supprimer tous les plus grands criminels de l’histoire…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le fantasme est célèbre dans le genre fantastique : si vous aviez l’usage d’une machine spatio-temporelle, vous n’en profiteriez pas, vous, pour supprimer les plus grands criminels de l’histoire, avant qu’ils ne commettent leurs exactions ? Le romancier René Barjavel a excellemment mis en exergue les limites de l’exercice à travers son Voyageur imprudent… En une pirouette, le duo Chanoinat/Castaza se débarrasse habilement du fameux paradoxe, pour mieux se concentrer sur leur divertissement, d’une limpidité à toute épreuve. Cet épisode d’exposition fait avant tout les présentations avec les personnages. Il y a tout d’abord le trio de héros, agents spatio-temporels recrutés « à l’insu de leur plein gré », sur le seul critère de leurs talents de hors-la-loi. Le rôle du « savant fou » est ensuite endossé par un savant paralytique qui n’a que 15 ans, mais qui a déjà inventé la machine à voyager dans le temps ! Si le contexte de série B autorise ce genre d’invraisemblance, il ne masque cependant pas la psychologie limite de la méchante de service, une jolie gouvernante (!) devenue tueuse psychopathe à travers les âges… En effet, l’élimination systématique des grands criminels n’a ici d’intérêt que la jouissance de tuer, étant donné que ces crimes dans le passé n’impactent pas sur notre continuum présent. Dès lors, pourquoi se limiter aux criminels ? Le tout est dessiné à l’aide du trait semi-réaliste habituel de Phil Castaza, qui peut enfin s’affranchir du décorum traditionnel du polar lautnérien pour se frotter à un nouveau genre, en un tome d’exposition plaisant et prometteur…