L'histoire :
Lac Kivu, Congo Belge, Mars 1958. Thomas vient de recevoir un télégramme : Rose a eu une attaque cérébrale. Elle est à moitié paralysée et les médecins ne sont guère optimistes. Pour Thomas, c’est un choc : il la considère comme sa mère car elle a élevé son frère Charles et lui, toute seule. Il décide de rentrer en Belgique pour la voir une dernière fois, laissant derrière lui son exploitation. Il fait une halte à Bukavu (ex-Costermansville) où il retrouve Alex, l’un de ses amis. Celui-ci lui donne des nouvelles de la politique actuelle : le Gouverneur Général Pétillon rêve d’une nation belgo-congolaise. Pour Alex, c’est un doux rêve. Rien ne viendra à bout des aspirations du peuple congolais. Comme le résume le conseiller congolais Diomi : « la volonté des congolais est d’être représentés par des congolais ». Après avoir volé avec la Sabena, Thomas se rend au chevet de Rose, à l’hôpital de la Bavière (Liège). Elle est dans le coma depuis 3 jours. Il croise Bernadette, sa fille, et Joseph, son ami curé qui lui donne des nouvelles de Thérèse, Firmin, Alice…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après s’être intéressé à la 2ème guerre mondiale, le duo Raives, Warnauts (30 ans de collaboration quand même !) revient à ses premières amours (les années 40-50) avec en toile de fond le Congo Belge. Les deux auteurs ont une méthode de travail bien huilée, peu commune dans l’univers du 9èmee art. Warnauts s’occupe du scénario, Raives, des couleurs, le reste étant un travail à quatre mains. Avec Les jours heureux, ils poursuivent leur fresque historique et politique, dans la lignée des diptyques réalisés ces dernières années. A partir de leur base de personnages mis en place dans la période de l'avant-guerre et de l'après-guerre, ils s’attachent à montrer la fin d’un monde, celui des colonies sous le joug des européens (le Congo Belge et l’Algérie française) et le début d’un autre en gestation, celui de l’indépendance des peuples. Ce passage de l’un à l’autre ne peut se faire que dans la violence. Ce contexte politique tendu n’occulte en rien leur goût pour le sentimentalisme. Ce monde en transition est mis en parallèle avec la transition des rapports humains entre les hommes et les femmes, de cette fin des années 50. Les femmes prennent également le chemin de l’indépendance. « Les faux bourdons sont de retour, comme à chaque printemps… juste bons à féconder la reine ». Elles sont libres de vivre leur vie de femme sans tabous : Bernadette est une métisse amoureuse d’un blanc, alors que Nina et Bénédicte s’aiment dans une société où l’homosexualité reste inconvenante. Cette juxtaposition entre politique et sentiments fonctionne, même si la narration n’est pas toujours évidente à suivre. D’un point de vue graphique, il n’y a rien à redire. Le trait et les couleurs conservent un romantisme plein de charme. Les fans de récits contemplatifs seront servis !