L'histoire :
A la fin de la deuxième guerre mondiale, Renault sera nationalisée, sur décision du général De Gaulle. Derrière la marque emblématique, il y a Louis Renault, le fondateur, un homme au passé contesté, mais sans aucun doute un génie de l'automobile. Quelques décennies plus tôt, à la fin du siècle précédent, Louis a les mains dans le cambouis lorsqu'il explique à son frère Marcel son idée révolutionnaire d'un arbre mécanique pour rendre beaucoup plus efficace la transmission de l'énergie d'un moteur. La famille Renault, confortablement installée dans son commerce de tissus, voit alors trois de ses fils quitter un avenir tout tracé pour ouvrir un atelier de mécanique, portés par le génie du petit Louis. Leurs premières voitures s'illustrent dans les folles courses automobiles de l'époque, jusqu`à ce que Marcel y perde la vie de manière dramatique. Fernand mourra seulement quelques années plus tard, laissant Louis seul maître du destin de son projet industriel, alors que la concurrence américaine incarnée par Ford présente un défi de taille. Des usines beaucoup plus productives se basent alors sur le taylorisme. Cela va motiver le jeune constructeur et décupler ses ambitions. Lorsque la première guerre mondiale éclate, Renault est déjà une entreprise importante, fleuron de la mécanique et sollicitée par le gouvernement pour soutenir l'effort de guerre. C'est le début d'une relation compliquée entre un passionné visionnaire et une forme d'exigence nationale. Un parcours complexe sur plusieurs décennies, alors que Louis Renault devient de plus en plus autoritaire et exigeant, radical défenseur de son entreprise confrontée à d'énormes enjeux historiques.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Bourrée d'informations et chargée de dialogues sur 80 pages remplies à ras bord, cette biographie de Louis Renault vise de toute évidence à établir des vérités sur le personnage. Sans en savoir beaucoup sur le célèbre industriel, on sent que l'auteur Antoine Lapasset ne réalise pas simplement une histoire de la vie de Renault, mais cherche à nous faire toucher du doigt la complexité des enjeux dans lesquels il a été plongé, sans éviter la période de l'occupation. Son portrait de l'industriel rend palpables la passion et la touche de folie qui ont présidé à la création du groupe, et insiste sur la personnalité hors du commun de Louis Renault. Son caractère de plus en plus impossible et ses tics de langage sont mis en scène de manière appuyée, ce qui le met en avant face aux défis industriels et historiques auxquels il est confronté. La narration est très linéaire et progresse en traversant les époques, et deux guerres mondiales, au cours desquelles son entreprise va jouer un rôle. Mais la volonté de développement de son entreprise est également très présente. Là aussi, on comprend que sans lui, Renault ne serait jamais devenu un géant. Aucune fioriture, cela dit, dans la mise en scène de ce livre : les moments forts se succèdent à un rythme soutenu, et on explique beaucoup de choses. Le dessin de Benjamin Beneteau est parfait pour le job, réaliste et totalement à l'aise pour mettre en scène les voitures et les engins. Un retour en arrière technologique parfaitement géré pour le dessinateur des bolides de Michel Vaillant, nouvelle époque. On apprend énormément de choses dans cette épopée dense, au détriment d'un certain confort de lecture.
