L'histoire :
En allant rendre visite à son ami Momo, Stéphane Clément rencontre par hasard le père de ce dernier dans un bar de Genève. Luigi Gottero est buraliste, mais il a longtemps caché son grand talent d'artiste, diplômé des Arts Déco de Genève en 1971. En retournant vers son appartement accompagné de Stéphane, le vieil homme est gravement blessé par un voleur qui s'enfuit avec un dossier sous le bras, se débarrassant de Stéphane d'un coup de poing au visage. Il meurt de ses blessures, et c'est un ami de Momo, policier à la Brigade des Enquêtes Réservées qui va apporter son aide au démarrage de l'enquête. Les indices sont très minces sur un éventuel mobile jusqu'à ce que Cynthia, la compagne de Stéphane, découvre que des meurtres sordides où des cadavres sont découpés et mis en scène semblent reproduire des tableaux de maîtres. Elle parvient à relier un tableau à chaque meurtre, donnant un sens à la série de mises en scène horribles sur lesquelles la BER piétinait. Cynthia organise justement dans la capitale suisse un festival de tableaux vivants, où des troupes reconstituent les scènes les plus marquantes de l'histoire de l'art. Un nouveau personnage immobile dans la vitrine d'un magasin, une femme droguée incarnant la Femme à la Corneille de Picasso, va débloquer l'enquête.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce retour de Stéphane Clément est l'occasion pour Daniel Ceppi de regrouper les univers de ses deux séries principales, puisque le baroudeur des Routes de Bharata retrouve les enquêteurs de CH Confidentiel. Ce one-shot totalement indépendant se lit sans qu'il soit nécessaire de connaitre le travail de l'auteur suisse, qui publie quand même des albums depuis 40 ans, le bougre ! Le jeune dessinateur maladroit des débuts dans Métal Hurlant a remarquablement progressé. Son dessin solide soutient désormais des enquêtes policières toujours aussi biens structurées. La raideur reste une marque de fabrique de ses personnages aux traits fins, la précision des décors soignés reflétant un travail qu'on imagine minutieux. Le visage de Stéphane est marqué par les années, le personnage n'a presque plus rien à voir avec le jeune homme des débuts. Sur le fond, l'enquête qui se déroule sous nos yeux est impeccablement construite, introduisant par petites touches les éléments qui donnent du sens aux meurtres en série. Stéphane Clément est finalement presque un personnage secondaire du récit, dont des pages entières se déroulent sans lui. Mais l'ensemble fonctionne parfaitement, le contexte moderne de la ville suisse et le concept des tableaux morbides se combinant très bien. La construction très classique du scénario est ce qui lie cet album au reste du travail de Ceppi. De solides histoires vécues par des personnages contemporains aux caractères réalistes. Et une lecture très prenante.