L'histoire :
Par une nuit d'encre, une frêle coque de noix tente péniblement de s'arracher aux rugissements d'une mer démontée. Lorsque une lueur lointaine déchire le voile nocturne. Rapidement, des falaises échancrées apparaissent, que surplombe la lourde masse du château de Tantallon. Au coeur de l'Ecosse, en l'abbaye royale de Dunfermline, son seigneur et comte William Douglas s'entretient alors secrètement avec la princesse Marjorie, soeur du roi David à l'article de la mort. Il s'agit d'empêcher que ne lui succède John de Lancastre, fils d'Edouard III d'Angleterre. La noble et déjà âgée dame ambitionne de placer sur le trône son propre fils Robert, descendant du célèbre Bruce dont la légende seule parviendrait à rassembler la nation contre les Godons anglais. Cependant, l'aube naissante, Messer Vasco Baglioni escalade difficilement le rocher mais à sa grande surprise, le château est aux mains des Anglais et le voici prisonnier. Dans sa cellule, il s'interroge : Comment lord Stafford, chef des troupes anglaises en terres d'Ecosse, a-t-il eu connaissance de la cargaison d'armes que transporte la nef ? Un traître ? Son oncle, le banquier Tolomei, avait pourtant tout prévu...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Lorsque joue le quinze écossais, il le fait sur des chardons ardents. Ou plutôt, il le fait sous le blason d'une nation qui s'enorgueillit du symbole d'une mauvaise herbe. Après la contrée bretonne de Brocéliande, Vasco poursuit son périple celtique aux prises avec les Anglo-saxons. Une escale piquante à souhait : en l'année 1371, alors que la guerre de cent ans tourne à l'avantage de la France, Edouard III d'Angleterre espère que son fils, John de Lancastre succède au roi David sur le trône d'Ecosse afin de renier l'indépendance octroyée aux Highlands depuis les victoires historiques de William Wallace (Braveheart) et le traité de Northampton. Mais « le clan Mac Douglas » (ou « le noeud de vipères », titre que n'aurait pas renié Hervé Bazin) ne l'entend pas de cette oreille et fait appel à la banque italienne, déjà prospère, familiale et urbaine, de l'oncle Tolomeï afin de faire pièce aux Godons. Aux couleurs chaudes et aux ambiances ocre jaunes de la méditerranée, succèdent pour un album encore les tons violacés, froids et gris, de l'île de Bretagne. Gilles Chaillet plante les racines d'une mêlée dont on ne sait lequel des deux packs va l'emporter. Derrière de solides piliers historiques, notre jeune siennois se retrouve l'ouvreur, à la fois observateur et capitaine, parfois contraint et forcé, d'une partie judicieusement mise en couleurs par Chantal Defachelle. Si l'on peut toujours regretter des schémas statiques, la plasticité de la tactique scénarisée reste soucieuse d'une véracité historique jamais prise en faute. Les trahisons, coups bas et autres plaquages irréguliers, rythment depuis le moyen age les derbies en l'Ecosse et l'Angleterre. A suivre le tournoi des six nations, la joute n'est point encore sifflée...