L'histoire :
Dans sa chambre d’adolescent, les pensées de François sont toutes entières tournées vers une unique personne : Isabelle Samain. François est totalement, éperdument, follement amoureux et il cultive cet état d’esprit qui le rend ivre de bonheur et de frustration. Il lui parle en pensées, il contemple sa collection de reliques qui la concernent – une mèche de cheveux, une socquette, une photo de classe, un crayon mordillé… Et puis à l’heure prévue, il se colle à la vitre de son appartement pour la voir attendre le bus, juste en face, à l’heure de son cours de tennis. La voilà, c’est elle… Et hop, elle est déjà partie. Un goûter plus tard, et c’est à son tour de prendre le bus en direction du club de tennis. Car François s’est inscrit uniquement pour pouvoir côtoyer Isabelle Samain au sein de cette pratique sportive. Hélas, au milieu de sa leçon, il apprend qu’elle s’est foulée la cheville une heure plus tôt et qu’elle ne viendra donc plus durant de longues semaines. De retour chez lui, désespéré, les bras ballants, il met en vente son équipement de tennis. La nuit suivante, il fait un raid sur la paroi de l’arrêt de bus, pour y inscrire au milieu d’un fatras d’inscriptions et de croquis ineptes « Je t’aime isabelle »…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Acteur au cinéma et au théâtre, ex-performeur d’impro des Deschiens, chroniqueur sur France Inter, écrivain, François Morel diversifie encore aujourd’hui son offre artistique en s’ouvrant à la bande dessinée. Avant le présent album de BD, C’est aujourd’hui que je vous aime est un récit autobiographique défini comme inadaptable par Morel himself (dans sa préface). Et c’est d’ailleurs parce que cette adaptation est impossible que son copain Pascal Rabaté l’a fait. Jadis, François Morel était donc amoureux d’une certaine Isabelle Samain et ce sont ses premiers émois qu’il raconte ici avec espièglerie. Evidemment, l’invocation de son adolescence se dévoile avec toute la sensibilité qu’on lui connait. Il pose un regard amusé et nostalgique sur son ancien moi amoureux, afin de souligner la tendresse et la naïveté de l’amour pur et sans réserve dont on est capable à cet âge. Rabaté décore donc cette chronique sentimentale aux couleurs (grises et ternes) des années Giscard, où un monde moderne radieux semblait encore possible. Et il rivalise d’imagination pour mettre en scène cet escogriffe de Morel et ses échevelées pulsions, représentées sous forme de doubles multiples fantomatiques de couleurs. Le trait de dessin se montre simple, complété d’aplats de couleurs ternes, mais toujours juste dans les attitudes et l’expressivité. Une belle histoire d’amour, en somme.