L'histoire :
Ozzy, surnommé « Géant », a emmené sa copine Donna en moto, pour faire un pique-nique nocturne dans un coin de forêt. Ils papotent, débouchent une bonne bouteille de vin et commencent à se lancer des regards équivoques... Lorsque soudain… un monstre terrifiant et répugnant, muni de dizaines d’yeux et venu d’une autre dimension, surgit du sol et engloutit Donna dans son immense bouche sertie de crocs. Ozzy reste un instant sonné par l’évènement. Il cherche du regard sa moto et l’enfourche pour fuir. Mais le monstre visqueux expulse un de ses globes oculaires à sa poursuite. Et tandis que Géant roule à fond, le globe oculaire tire un faisceau dans sa direction. Le faisceau touche une sorte de menhir, ce qui produit une hache à double tranchant. Géant passe à côté et lance sa moto à l’assaut d’une paroi, afin de faire un demi-tour acrobatique. Il revient affronter le globe oculaire, lorsque sa roue percute le tranchant de la hache. C’est l’accident : Géant et sa moto volent dans les airs. Mais le globe tire un nouveau faisceau qui atteint la moto. Celle-ci se transforme en épée et Géant continue donc son vol avec une épée à la main. Un vol qu’il termine en s’engouffrant à son tour dans l’énorme bouche dentue du monstre, vers une terrifiante dimension parallèle…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
A la lecture du résumé ci-dessus, vous conviendrez qu'il y a tout de même de grandes chances que l’auteur danois Rune Ryberg ait réalisé cette histoire complètement surréaliste sous l’emprise d’un puissant psychotrope ou d’une substance propice à laisser dériver l’imagination vers les mondes les plus étranges… Il semble d’ailleurs cohérent que ce soit la toute jeune maison d’édition « Les aventuriers de l’étrange » qui le publie aujourd’hui. Logique mais, pour le coup, très aventureux ! Car on se demande bien quel genre de parcours initiatique parabolique a voulu mettre en exergue Ryberg et quel genre public y trouvera un sens. Le lecteur ouvert suit ici une aventure mise au point selon ce qui ressemble à une « écriture automatique » (dans laquelle n’intervient ni la conscience, ni la volonté). D’emblée, on ne sait rien du couple de personnages, et on n’en saura pas grand-chose de plus à la fin non plus. D’ailleurs, pourquoi le héros est-il surnommé « Géant », au point d’en forger ce titre un peu prétentieux ? Un monstre chtonien déboule au milieu d’une séquence drague, ok tout va bien. On suit dès lors une narration majoritairement visuelle, aux étapes aussi dingues que gratuites, enluminées par les formes et les couleurs d’un univers un peu kitsch, inspirées du décorum des mondes extraterrestres fantasmés et périlleux. Le dessin ultra-stylisé est la plus-value première de l’aventure. Le héros a des membres qui zigzaguent, une tête rectangulaire et un nez en triangle isocèle. Les créatures ont les yeux qui dégoulinent comme les montres de Dali, mais des dents surnuméraires. On sent parfois un début de vrai souffle homérique dans un panorama fabuleux (la case géante p.30), mais qui se referme très vite en nous perdant dans le flou d’intention et le peu de direction qu’accorde l’auteur à son récit. La vie serait-elle un « fâcheux rendez-vous » ?