L'histoire :
Alice vient d'accoucher d'une petite Jeanne. Elle est mariée, heureuse. Et puis, un jour comme un autre, en rentrant dans leur appartement, celui-ci est fermé et vient d'être vendu aux enchères. Aucun des deux conjoints n'est capable de l'expliquer et pourtant, en quelques jours de mensonges encore délivrés, la réalité va se faire jour : Marc, l'amour de sa vie, a menti, cumulé des dettes astronomiques, et va disparaitre définitivement de leur vie à toutes les deux, laissant Alice hébétée avec tout le poids de dizaines d'années à démêler, à reconstruire. Le temps du déni, de la colère, de la tristesse, et enfin de la reconstitution. La famille et les amis vont aider dans une certaine mesure. Mais c’est surtout le parcours du combattant qui commence, avec les administrations. Comment tout cela a-t-il pu arriver ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Si l'on aborde les premières pages de l'Imposture avec une légère réticence, c'est que le trait de Marie Bosch est encore jeune, vert. Il fait craindre une bande dessinée réalisée à cause d'un sujet lourd et intéressant, qui ne serait que l'unique faire-valoir d'une œuvre narrative. Celui-ci est cependant tellement incroyable et bien amené, à l'aide d'un découpage simple mais maitrisé, que l'on se surprend à enchaîner le défilement des pages, pris par l'intrigue. Marie Bosch évoque avec sincérité et humour son histoire incroyable, en n'omettant cela dit peu de détails digne d'une tragédie. Le parcours de lutte, avec ou contre l'administration pour tâcher de recouvrer quelques droits en tant que femme seule, abandonnée avec une jeune enfant, fait froid dans le dos. Les règlements relatifs au mariage en prennent d'ailleurs pas mal pour leur grade. Certes, le dessin est assez minimaliste, quoi que sans erreurs notoires, dans un style noir et blanc au stylo ne laissant apparaître que quelques aplats noirs équilibrant au strict minimum les planches. Mais l'on se prend quand même à s'arrêter sur certains rares passages pleines pages, où l'autrice se permet quelques détails et effets graphiques (pages 10, 20, 46, 55, 100, 122). Idem pour la dernière page, à l'occasion d'une balade dans un parc, qui nous fait dire que Marie Bosch a gagné avec ce titre ses galons d'autrice complète, son style s'étant sensiblement affiné au fil du projet. Elle possède aussi désormais suffisamment de recul et de légitimité pour s'autoriser à nous offrir une suite à celui-ci, quel que soit le sujet. S'il y a une imposture, ce n'est donc pas sur la naissance d'une nouvelle autrice de bande dessinée. Un témoignage poignant bienvenu, pouvant se lire comme un manuel de survie féministe en milieu sociétal effondré.
