L'histoire :
Il y a plus de 10 000 ans, la Terre cessa de tourner sur elle-même. Depuis ce temps, le jour et la nuit ne sont plus des marqueurs temporels, mais les deux extrémités d'une planète meurtrie. L'un des pôles brûle sous un soleil implacable, tandis que l'autre est recouvert de glace éternelle et balayé par des vents violents. Entre ces deux zones inhospitalières subsiste une étroite bande habitable, où les vestiges de l'humanité survivent au sein d'une civilisation barbare éparse, composée de petits villages. C'est là qu'Arkas vit avec son fils Vlad. Tout bascule avec l'arrivée d’une étrangère venue de la nuit, une femme mystérieuse qui tue son enfant. Fou de douleur, Arkas plonge dans une rage meurtrière avant d’être frappé par une pierre de lune qui s’incruste dans son front. Après une période d’errance, il rencontre Albe, une sorcière qui prend soin de lui. Pourtant, en voulant l’aider, elle l’oriente involontairement vers la légendaire Ville-d’Où-l’On-ne-Revient-Pas. Arkas laisse alors derrière lui un fils qu’il ne rencontrera jamais, Arkadi. Pendant ce temps, dans la cité de Dité, au cœur de l’éternelle nuit, Or-Fé, un titan poète fait de chair et de métal, apprend que sa bien-aimée R.i-10 a été clonée. On lui promet qu’il pourra l’approcher, à la condition de ne jamais la regarder. Mais son désir est trop fort. Bravant l’interdit, il se brûle les yeux, condamnant du même coup les élus qui voyaient à travers lui, et provoque la mort du clone. Dévasté par la douleur, Or-Fé quitte Dité, abandonnant ses habitants, privés de son art vital.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Rééditée dans son intégralité à l’occasion des 50 ans des Humanoïdes Associés, l’œuvre de Caza brille par sa richesse thématique et graphique. Cette saga, profondément marquée par des influences mythologiques grecques (Or-Fé), nordiques (Hel) et bibliques (Jonas), constitue un véritable melting-pot des récits de l’imaginaire et des sous-genres de la science-fiction. Ce mélange pourrait sembler disparate, mais Caza parvient à créer une alchimie narrative parfaitement maîtrisée. Au-delà de son univers foisonnant, la série se distingue par sa portée symbolique et ses messages engagés. Elle se lit comme une fable anti-nucléaire et une réflexion visionnaire sur l’addiction aux écrans. Arkadi, personnage principal malgré lui, incarne à la fois un pantin manipulé par les volontés des autres protagonistes et un élément clé de l’intrigue. Visuellement, le dessin de Caza est un régal, virtuose, d’une finesse et d’une technicité impressionnantes. Chaque planche est une œuvre d’art, même si l’abondance de nudité, parfois superflue, peut interroger sur sa réelle nécessité narrative. On note cependant une rupture graphique à partir du tome 7, marquée par des traits plus épais et un style moins détaillé. Ce changement, dû à une longue interruption du récit et à l’introduction des outils numériques par l’artiste, peut désarçonner, mais il permet aussi d’accélérer le rythme du récit pour offrir un dénouement à la hauteur des attentes.
