L'histoire :
Dans un style Blanquet en ombres chinoises, Un stratège à moustache de Laurent Siefer, remonte le temps pour nous conter les origines supposées du chat. Réjouissante, la férocité du récit C’est pour ton bien de Diego Agrimbo et Lucas Varela, où il ne fait pas bon castrer son matou, surtout s’il est bizarre. Grégory Panaccione est toujours aussi inspiré avec une fable ésotérique et poétique. Peter Snejbjerg et Ole Comoll font de la SF fun. Zelba livre un conte érotique tout en griffes – et c'est sa première participation réussie. Serial Kitten est un récit au style graphique jeunesse mais à l'humour acide de Jean-Luc Cornette et Seera. Les gouaches numériques de Jurek Lalottke appuient avec talent son dur récit Plushie tandis que l'on découvre le beau dessin peint de l'espagnol Manolo Carot sur un récit SF un peu effrayant, et celui plus humour du néerlandais Bob Op't Land dans L'Oiseau, le serpent et le chat. Nancy Pena nous ravit de son trait fin noir et blanc dans l’histoire de fantômes ferroviaires Zannen ! Sergio Vanello offre cing planches aquarellées avec Cosmo et le rare Alexandre Kha aborde le lien ancestral entre les chats et la lecture dans Les chats sentinelles. Superbe. Le ronronnement comme remède cathartique inspire Hai-Anh et Pauline Guitton, autrices du beau Song chez Ankama. Un duo sûr. Daria Schmidt dévoile son style graphique au cours de six pages muettes magnifiques. Fabio Ruotolo, au beau style façon Das Pastoras sublime le récit de sorcellerie moyenâgeux réalisé avec Pog. Elisabeth Holleville en six planches aux aplats colorés rose et vert pâle se joue habilement du chat... et de nous. Zoran Janjetov décoiffe en trois planches, avec humour. Surprise : Laurent Lefeuvre délaisse son héros Fox Boy, pour un récit en couleurs surfant sur ses contes de Seignoles, en plus... érotique et horrifique. Osé. On retrouve Toru Terada avec son style bien particulier, entre un Mignola et Thierry Martin pour un récit SF étonnant. Joko renverse les codes avec La planète des chats, relecture en noir et blanc et avec humour du classique SF de Pierre Boulle. Jean Claude Denis nous ravit avec un récit à la belle douceur, tandis que Laurent Siefer et Pierre-Henri Laporterie nous transportent avec talent dans le temps et l'espace via un récit et une palette graphique numérique ciselés. Le conte japonais d'Elisa Menini nous comble de sa loufoquerie en trois couleurs. Chabouté opte, lui, pour 12 tableaux en noir et blanc, répartis au sein du numéro, tandis que Bilal délivre une seule mais belle peinture introductive au récit de Laurent Siefer.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Aujourd'hui, l'histoire de Métal hurlant et ses trois périodes distinctes est bien connue, sa dernière formule étant installée et de qualité. Aussi, ce numéro Spécial Chats laissé à la direction éditoriale de Jean-Pierre Dionnet, l'un de ses créateurs originels et rédacteur en chef, a de quoi susciter l'intérêt, sinon l'impatience. Et c'est une nouvelle fois une réussite. Sur 288 pages, c'est à un hommage ambitieux et réussi au félin, ami chéri de l'homme, auquel le lecteur est convié. Pas moins de 29 récits sous formes de bandes dessinées, rivalisant de malice et d'inventivité, nous sont proposés. Concernant la partie éditoriale, Vincent Brunner signe deux bons articles sur deux séries BD mettant en scène un félin : Le chat du Rabbin et Blacksad. Une verve et une passion raffinée de connaisseur que l'on savoure avec grand plaisir. Vincent Ravalec nous livre sa nouvelle déconcertante en deux pages : Ambassadeurs du diable, illustrées par Beb-Deum. Julie le Baron revient sur le succès du jeu vidéo Stray, de la société montpelliéraine BlueTwelve, sorti en 2002. Attention, chats méchants, par François Rivière et Guillem Barbet dévoile les dessous du récit fantastique félin, de ses origines par Lovecraft en passant par le Fanu, le chat Murr, des traditions moyenâgeuses, les récits japonais illustrés du XIXème, jusqu'en 1963 et la collection Fleuve noir, tandis que Gérard Delorme aborde le chat au cinéma. Goûteux. Le dernier Chat est une nouvelle de huit pages de Richard Marazano, superbement illustrée. Tout le monde veut devenir un cat par Jean-Emmanuel Deluxe tente de résumer en deux pages la thématique du chat dans le jazz et le rock, quoiqu'en débutant par Mozart. Téméraire mais intéressant. Chats du futur et d'ailleurs s'occupe, sous la plume de Claude Ecken et en huit pages, de parcourir plus de 80 ans de littératures fantastiques, SF, dédiées aux chats… et c'est un régal. Philippe Geluck, l'auteur du Chat, ne pouvait pas être absent de ce numéro. Christophe Quillien l'interviewe, tout comme il revient en deux pages sur le récit muet culte de Moebius et Jodorowsky : Les yeux du chat, paru en 1978, avant l'Incal. Nyan! par Stéphane Mesnildot aborde l'insularité des chats japonais, nombreux dans cette culture, qu'elle soit littéraire, cinématographique, manga. Lionel Marty conclut non sans humour ce volume en proposant un gag dessiné d'une page avec... un chien. Un message annonçant le prochain hors-série !? S'il est aussi bon et complet que celui-ci, on en redemande ! Une revue d’utilité publique.
