L'histoire :
Sur une planète semi-végétale d’un côté, semi-urbaine de l’autre, un colosse est sorti de sa cambrousse pour pénétrer dans la ville. Fébrile dans cet environnement vertical gigantesque, pollué, surpeuplé, en constante expansion, il s’est mis à perpétrer des meurtres d’une violence inouïe. Car à travers son « regard végétal », il sonde l’âme des gens qu’il rencontre, en mesure l’« énergie biologique » et n’a aucune pitié à pulvériser les « nécrosés ». Il est alors appréhendé, en flagrant délit de massacre dans une rame de métro, par l’inspecteur Mornières, un jeune flic intègre et victime d’un complexe d’infériorité. L’arrestation se déroule dans le plus grand calme car le colosse perçoit la grandeur d’âme du policier. Quelques minutes plus tard, le colosse recouvre pourtant un sursaut de sauvagerie en apercevant un autre inspecteur, le haineux Rougalphes. Le colosse s’évade en lui arrachant une main ! Il est alors recueilli par les membres d’une confrérie végétale, qui le laissent se régénérer en position fœtale au pied d’un grand arbre, au sein d’un zoo délabré. De son côté, rien ne va plus dans la vie de Mornières. Traité comme une sous-merde par sa famille, il est mis à pied par son supérieur pour surmenage. Il en profite pour prendre la clef des champs, en quête des origines de ce mystérieux meurtrier…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Dans ce second volet (sur 3 prévus), la majorité des clefs de cet univers à la croisée de la fantasy, du thriller et du steampunk, nous sont dévoilées. On y apprend l’origine divine de cette lutte urbaine-végétale et au-delà, on découvre un propos politique et écologique qui dépasse le simple récit fantastique. Certes, les grandes idées émises par Jean-David Morvan sont assez consensuelles – le respect de la nature c’est quand même plus sympa que l’urbanisation galopante. Par répercussion, à quoi pensez-vous que le capitalisme peut aboutir ? Au moins cette métaphore a-t-elle l’avantage de poser des questions de société éminemment d’actualité – comme souvent chez Morvan, qui emprunte ici une thématique récurrente de son œuvre (Sillage, Reality Show). Revenons au récit. Du fait des contingences plus végétales, la sinistrose urbaine est moins présente, au profit d’ambiances plus… « organiques ». Au dessin, Alexandre Nesmo s’en accommode fort bien, livrant un graphisme tout aussi abouti que sur le premier tome. Au sein d’un découpage dense et minutieux, équilibré par une pondération de dialogues, le dessinateur nous ravit une nouvelle fois de profondeurs vertigineuses. La cage d’ascenseur, le puits, les plongées sur la ville… Nesmo impose sa maîtrise des cadrages, sa gestion du relief et des mouvements, encore rehaussées par une colorisation soignée. De la belle ouvrage, aboutie et appliquée, dont on attend le troisième et dernier tome sans bouder notre enthousiasme.