L'histoire :
Du haut de sa retraite campagnarde, Bouzard regarde le monde avec une lucidité emprunte de sagesse. Il hume l’air, contemple son environnement et se sustente de cet équilibre homme/nature si harmonieux. Soudain, il se rend compte qu’il a oublié la réunion de son association qu’il a montée avec des potes et qui a pour but de promouvoir toutes formes de musique en milieu rur… Bref. Il prend les jambes à son cou, prévient sa douce, sa tendre, sa muse, Cécile (qui s’en tape le coquillard) et se pointe au bistrot avec trois quarts d’heure de retard. En marge de quelques remontrances, il commande au patron, Jacquot, un croque-monsieur. Ce qui l’énerve passablement, le Jacquot, car il vient juste d’en faire un à David et qu’il a déjà tout nettoyé dans la cuisine et rangé le jambon dans le frig… Bref. Tandis que Jacquot s’en va faire un croque en grommelant, le pote Eric débarque. Ce qui fait penser à Bouzard que, dans sa précipitation, il a oublié les disques. Heureusement, Jacquot sort ses vinyles de Jean Ferrat, et avec quelques bières dans le gosier, on ne voit pas trop la différence. C’est quand même bien foutu la nature…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Bouzard ! Voilà un nom qui claque au vent comme un étendard ; qui fait frémir le jaguar ; qui se dresse tel un braquem… Bref. Non content d’animer les aventures burlesques de Plageman et d’être amateur de Football Football chez poisson pilote, le sieur Bouzard (Guillaume de son prénom) nous réjouit d’une troisième aventure de lui-même, dans son chez-soi, empruntant une nouvelle fois le rôle du quidam-lambda (l’opposé du super-héros) en proie à ses considérations quotidiennes zé métaphysiques. Or, rien de tel qu’un petit coin de verdure, retiré du monde moderne vrombissant, pour saisir le mystère de l’instant et en abuser de la plus drôle des manières. Bouzard se la joue donc un peu Larcenet, dans le registre Retour à la terre, mais en noir et blanc et en pas pareil. Car les idées de Bouzard partent en général d’un petit rien, d’un vague sentiment instantané ou de la vision de son con de chien qui roupille dans la brouette, pour finalement construire un monument comique irrésistible aux zygomatiques. A l’opposée totale des recueils de gags consensuels et stéréotypés, l’auteur montre en effet une propension à faire rire plusieurs fois par planche, à balancer la vanne ou la tronche qui tue, voire les deux en même temps. Si le dessin relativement spontané ne se la pète guère (surtout la couverture, fushia fluo), l’auteur montre une réelle maîtrise du rythme et de l’impact, se jouant adroitement des digressions et d’un découpage régulier en « gaufrier ». Surtout, ne passez pas à côté de ce bijou d’humour, car la pomme roule et pourrit si nul ne la mange…