L'histoire :
Que regarde-t-elle, la femme sur le pont, le visage en partie caché par l’ombre ? Que voit-elle ? Qu'espère-t-elle ? Elle attend quelque chose, quelqu’un, c’est évident, un signe, un présage. Elle ne sait pas quoi, au juste, un message à elle seule destiné ? Les premières pages de l’ouvrage commencent par cette femme de profil qui pose sa main sur son visage de manière à voir au loin, à scruter l'horizon. Cette femme est sur le pont d’un bateau. Elle est à la fois inconnue et familière. Les gratte-ciel derrière elle évoquent l’Amérique, cette Amérique que l’on porte en nous, comme on possède un paysage intérieur de lecture, de films, de musique, de peinture, de photographie. Quelque part, l’Amérique, c’est le seul pays que l’on connaît déjà avant d’y avoir posé le pied. On aime imaginer notre vie là-bas. Cette femme nous invite à cette imagination, cette projection, que l’on soit à New York, à Los Angeles, à Paris ou ailleurs. Comme le narrateur, on aime s’asseoir à la terrasse d’un café. Il suffit d’une silhouette qui passe pour que l’on invente son histoire. Un homme. Une femme. Toutes ces vies que nous pourrions vivre…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
L'Amérique est la terre de tous les excès, de toutes les contradictions, de toutes les superbes, de toutes les interrogations. Les élections américaines nous le montre à chaque fois. D'un côté, elle fascine par son côté XXL. Là-bas, les électeurs sont grands, les buildings tutoient le ciel, les routes sont infinies. Cette démesure se retrouve partout, everywhere. D'un côté, elle révulse par sa violence, son incohérence. C'est Le meilleur des mondes d'Aldous Huxley, avec un revers de médaille. Qui mieux que Miles Hyman pour nous la raconter avec ses images décalées, une petite fille avec une tête de lapin qui fait de la corde à sauter devant un motel, un flamant qui passe au second plan alors qu'une femme lit un livre. Et si le flamant rose voulait lire lui aussi ? On retrouve une femme en combinaison de bain, avec un bonnet rouge. Et puis, il y a cette grâce graphique propre à Hyman qui nous habite, qui nous transporte. Les textes de François Busnel, empreints de poésie, nous accompagnent dans ce voyage aux confins de l'Amérique. America, c'est beau trip avec un A majuscule.