L'histoire :
Une expédition de quatre savants français partie de Brest vers l’Équateur et composée de l’ambitieux Charles-Marie de La Condamine, de l’austère mathématicien Pierre Bouguer, de Louis Godin, un astronome curieux des femmes créoles et de Jussieu, un médecin à l’éthique irréprochable, débarque sur ordre du Roi afin de vérifier si la Terre est bien ronde ! Pour ce faire, cette seconde expédition, la première étant en arctique, doit mesurer la courbure des méridiens. Mais tout ne se passe pas comme prévue dans un pays appartenant au royaume d’Espagne, imposant une forte répression à une population malade de la variole, colonisée et christianisée. Dans la moiteur de la jungle, les ambitions de chacun se révéleront pour le pire…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Méridien est un projet de longue date, ayant connu de nombreux aléas avant publication. Mais au final, on ne peut que louer la persévérance des deux auteurs à produire un si bel album, à contre-courant des modes actuelles, pouvant rappeler les grands récits du mensuel (A Suivre). Le scénario d’Arnaud Le Gouëfflec, qui s’autorise à romancer cette histoire adaptée de faits réels, est savamment construit, alternant les points de vue des différents personnages en un récit que l’on pourrait qualifier de « choral ». Le tout forme une histoire profondément humaine dans laquelle les protagonistes se révèlent paradoxaux, faibles, empathiques, ambitieux, menteurs… On s’amuse de ce petit théâtre de la comédie humaine où ces savants, élite poudrée et costumée, traversent l’Amérique du Sud pour se déchirer au gré des ambitions individuelles. Cette entreprise se fait sous le regard d’oiseaux bavards, reliant les séquences comme le faisaient naguère les hiéroglyphes, poissons ou statues dans Corto Maltese. Quant au dessin de Briac, il explose de couleurs créant des ambiances magnifiques, œuvrant beaucoup pour la qualité du récit. Son trait, reconnaissable entre tous, s’avère toujours juste. Dire que chaque planche est un régal pour les yeux est un euphémisme, même si certains pourraient regretter çà et là quelques postures trop statiques qui ne nuisent en rien à la qualité d’ensemble. La narration, sage et classique, s’autorise quelques écarts bien sentis comme la scène du tremblement de terre. Enfin, saluons le beau travail de l’éditeur qui propose un objet soigné, accompagné d’un cahier graphique bienvenu. Méridien fait assurément déjà partie des très beaux albums de l’année.