L'histoire :
Lucky Luke et son fidèle Jolly Jumper arrivent dans la petite ville de Cattle Gulch en plein tumulte. En effet, les habitants sont sur le point de lyncher de manière inique Ovide Byrde, un incorrigible protecteur les animaux. Les éleveurs et les cow-boys ne supportent plus que ce marginal sabote incessamment leurs élevages, ou vole leurs chevaux, sous prétexte de bien-être animal. Luke intervient pour sauver Byrde de la pendaison. Dans la foulée, il le raccompagne chez lui, une petite ferme à l’écart de la ville. Luke constate que les nombreux animaux que Byrde protège lui rendent largement son amour. Moult espèces accourent vers lui pour le léchouiller. Byrde explique sa philosophie à Lucky Luke, issue du mouvement d’Henry Bergh, le fondateur de la SPA. Le farwest n’a jamais été un modèle de douceur pour les bêtes : entre les chasseurs de bisons, les trappeurs qui vendent la peau des castors et des ours, les bovins marqués aux fers rouges, les chevaux poussés à bout de forces sous des soleils de plomb… Byrde a ainsi décidé de vouer sa vie à la protection des animaux. Il veut notamment convaincre un maximum de ses contemporains de devenir végétariens. Et tandis qu’il prépare une délicieuse tarte aux poireaux à son invité, Lucky Luke a la surprise de voir que Rantanplan, le chien le plus idiot et indolent qu’il connaisse, s’est lui aussi réfugié chez Byrde…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après la ségrégation raciale inspirée du meurtre de Georges Floyd, dans Un cow-boy dans le coton, Lucky Luke s’intéresse à un autre sujet de société terriblement ancré dans l’air du temps : le bien-être animal. En effet, une épizootie de covid (le virus est issu du monde animal) est passée par-là, ainsi qu’une prise de conscience écologique. L’élevage des animaux à des fins de nourriture pèse terriblement sur notre empreinte carbone… et la réduction irrépressible des zones sauvage à des fins de développement économique humain nuit considérablement à la diversité et à la quantité des espèces. Faut-il donc que l’Homme devienne végétarien, à court terme ? Le scénariste Jul place cette question anachronique au far-west, à l’époque où un certain Henry Bergh crée la première Société Protectrice des Animaux (1866). Une courte biographie en fin d’album nous apprend d’ailleurs que ce dernier était financé par un milliardaire français repenti d’avoir fait fortune dans le commerce de fourrures ! Evidemment, imposer le veganisme au milieu des éleveurs de bêtes et des cow-boys, c’est loin d’être gagné… Et notre héros qui tire plus vite que son ombre joue de son mieux au casque bleu, entre les doux et les dingues. Lucky Luke a arrêté de fumer en 1983… va-t-il donc aujourd’hui arrêter de manger des steaks ? Et… militer ainsi contre son propre métier de cow-boy !? Jul est malin et il ne tranche pas, se contentant de pousser Luke à rétablir la paix sociale et laissant le débat de fond aux générations futures. L’auteur s’amuse en revanche beaucoup avec les jeux de mots (ha, le fameux cobaye solitaire…) et les situations truculentes, notamment en attribuant à Rantanplan, le chien le plus crétin de l’Ouest américain, des déductions systématiquement à côté de la plaque. Le dessinateur Achdé décline quant à lui une fois de plus admirablement la griffe (animale) dynamique morrissienne.