L'histoire :
C’est le train-train pour Lucky Luke : le lundi, il arrête des Dalton ; le mardi, il joue du lasso sur des veaux ; le mercredi, il arrête des pilleurs de banques ; le jeudi, il règle son compte à un indien kidnappeur ; le vendredi, il escorte un troupeau ; le samedi, c’est rodéo ; etc. Et soudain, c’est le drame : Luke se coince le dos. Un fermier lui conseille un bon médecin dans le patelin de New München, créé par une colonie allemande. Après un long moment dans la salle d’attente d’un cabinet très prisé, le médecin débloque efficacement le dos de Luke et lui prescrit des antidouleurs. Quand il ressort de chez le toubib, des patients, dont le maire de la ville, l’interpellent, car ils l’ont reconnu. Ils le supplient que Luke les aide, car il leur arrive une tragédie : leur approvisionnement en bière est totalement interrompu depuis des semaines, en raison d’une grève des ouvriers des brasseries. N’écoutant que son altruisme, Luke se rend donc dans la grosse ville de Milwaukee, où la plus grosse brasserie est tenue par le puissant Frederick Martz. Luke découvre que tout le monde parle allemand dans cette ville, à l’exception d’une vieille connaissance : son ami apache Aigle-à-deux-têtes ! Ce dernier a trouvé de l’embauche ici, car son insensibilité au vertige est un atout pour construire les hauts buildings de la ville…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Toujours astucieusement scénarisé par Jul, digne repreneur des aventures du cowboy qui tire plus vite que son ombre, Lucky Luke passe cette 11ème « nouvelle » aventure dans la ville de Milwaukee (100 bornes au Nord de Chicago, au bord du lac Michigan). C’est en effet là que se déroule un drame terrible, une tragédie à nulle autre pareille : une pénurie de bière. Pardon d’évoquer cela sans plus de ménagement. A travers cette histoire fort bien ficelée et documentée, Jul brasse deux thématiques. Primo, la colonisation américaine par des colonies allemandes (6 millions de migrants dans la « German Belt »), qui ont exporté nombre ingrédients de leur culture – au point qu’il fut un temps envisagé d’adopter l’allemand comme langue officielle du pays ! Les présidents Dwight Eisenhower ou Donald Trump, sont par exemple d’origine germanique. Mais c’est aussi le ketchup Heinz, la mode des hotdogs (avec des saucisses… de Francfort) et des hamburgers (…de Hambourg), ou la mode de la décoration des sapins de Noël. Deuxio, Luke tente de ramener la paix sociale entre un employeur inflexible (inspiré par un authentique brasseur dont le portrait est proposé en fin d’album) et des salariés qui ont découvert le marxisme. En attendant que la négociation aboutisse, notre héros se retrouve à encadrer des prisonniers – dont les inévitables Dalton – employés pour remettre en route la production de bière tant attendue dans le pays. Les jeux de mots et clin d’œil spirituels pleuvent et nourrissent cette aventure en milieu industriel, toujours admirablement dessinée par Achdé, excellent repreneur graphique lui aussi du célèbre cowboy, monument du 9ème art. Un bon brassin !