L'histoire :
Journaliste pour la rédaction de Véridique, Alex vient de commettre la bourde de sa vie. Il avait décroché une interview de Bachar El-Assad, mais celle-ci est impossible, car il a oublié de faire une demande de visa. Son rédac chef est furax. Sa collègue Marise, photojournaliste et tête brûlée, lui paie une bière pour le rasséréner. Le soir même, Alex a une idée folle pour se rattraper ! Il propose aussitôt à Marise de tenter d’obtenir une interview du dictateur du pays le plus fermé du monde, Kim Jung-un. Les informations à son sujet sont dingues… et surtout méconnues et intrigantes. Il propose à Marise de se faire passer pour des investisseurs qui veulent faire affaire avec la Corée du Nord. Et de contacter pour cela le seul occidental qui sert marginalement d’intermédiaire dans ces cas-là, l’espagnol Alejandro Cao de Beños de les y Pérez. L’idée murit : ils décident de se faire passer pour des chocolatiers ! Le chocolat est en effet une denrée très appréciée du dictateur, gourmand de réputation, avec laquelle on peut se livrer à bien des fantaisies : des missiles en chocolat, des bustes de la dynastie des Kim, des Kalashnikov… Alex entreprend aussitôt d’être incollable sur toutes les données économiques liées au chocolat.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Cette histoire d’infiltration en Corée du Nord est tirée d’un reportage authentiquement vécu par le co-scénariste Antoine Dreyfus, mais entrepris en 2008. Cette aventure en BD, qui en est issue, prend pour contexte notre époque – l’alliance avec Poutine contre l’Ukraine. Elle est donc partiellement fictive et aussi quelque peu anachronique. Depuis 16 ans, la société Coréenne a sans doute beaucoup changé… mais étant donné que c’est le pays le plus fermé et tyrannique du monde, on ne peut s’en remettre qu’aux extrapolations. C’est ce grand mystère périlleux qui est à l’œuvre dans les tensions de l’histoire. Notre duo de journalistes joue au bureau des légendes, en se faisant passer pour des chocolatiers pour obtenir une interview de Kim Jung-un. Ils nous partagent ainsi un « tourist-tour » fantasmé de Pyongyang, d’une tristesse infinie, d’une pauvreté intellectuelle abyssale, avec une surveillance drastique permanente qui peut aboutir à chaque instant à une exécution sommaire. Ce point de vue est certes potentiellement caricatural… néanmoins la dimension ubuesque de cette société qui voue un culte outrancier de la personnalité à leurs dirigeants est parfaitement juste. Le dessin fun et stylisé de Fanny Briant soulage un peu le stress de cette aventure d’espionnage tragi-comique, qui n’aboutit à pas grand-chose.