L'histoire :
Il l’abreuve de paroles, de mots doux, de phrases poétiques mais en son for intérieur, il ne comprend pas comment une jeune fille aussi belle voudrait de lui, ne serait-ce que pour une nuit. Ils avaient certes échangé et il l’avait aidé à terminer son mémoire mais de là à avoir une liaison… Il n’a pas envie de se poser de questions et compte bien profiter du moment présent, même si le Red Corner et sa chambre façon Scheherazade, c’est un peu particulier. Elle se déshabille lentement mais garde toujours son grand voile sur la tête, la rendant encore plus mystérieuse et encore plus désirable. Elle se rapproche de lui, lui enlève délicatement ses lunettes et lui bande les yeux avec un tissu rempli de son parfum envoûtant. Faire ça sous forme de jeu ? Pourquoi pas après tout, ça ne peut que rendre les choses plus excitantes ! Mais elle ne s’arrête pas là, puisqu’elle sort des menottes et l’attache contre le montant du lit. Le métal froid lui échauffe les sens : la situation devient vraiment pimentée. Il apprécie ce côté incertain et un peu fou. Cependant, il sent une légère piqure sur le flanc. Qu’est ce qu’il se passe ? A quoi joue Bamby ? Quand elle sort un rasoir de sa main, il est trop tard. Elle lui taillade les veines sans ménagement et il s’évanouit très rapidement avant de se vider de son sang…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Comme les longs voyages qu’il raconte, Joel Alessandra nous surprend à chacune de ses destinations. En effet, ce nouvel album est pour le moins original dans son parcours puisque, pour la première fois, il s’attaque au genre du polar. Il adapte le roman de Michel Bussi et l’on sent la patte de l’écrivain dans cette reprise. Les personnages sont travaillés, l’intrigue complexe et les endroits et temporalités multiples. Cette sombre affaire de meurtre fascine totalement d’entrée de jeu, à l’image du visage mystérieux de cette femme assassin avec son voile plein de chouettes. On ne sait jamais où l’on va tant la narration est morcelée et faite de différentes pièces de puzzle qui jouent sur les retours en arrière et les zones d’ombre et de silence. Un vrai bon polar, donc, avec son lot de personnages répugnants et ses révélations chocs et étonnantes. Cependant, ce serait méconnaître Alessandra que de limiter cette histoire à une énième enquête déjà lue, même si elle est remarquable dans son suspense et son traitement. Il fallait forcément un fond de voyage et d’exotisme avec toute l’humanité qui va avec. Cette saga familiale très particulière est une sublime peinture de l’immigration et de ses sombres magouilles. Alessandra rend un puissant hommage à toutes les femmes seules qui doivent lutter contre le monde entier, à travers le sombre destin de la famille Maal. Le déracinement, les viols, la corruption… tout y passe dans ce sinistre tableau et pourtant, le graphisme doux et sensible d’Alessandra permet de respirer quelque peu au milieu de la cruauté. L’auteur a trouvé LE récit parfait qui synthétise toute l’étendue de son talent.
