L'histoire :
Le 18 février 1898, sous une averse de neige, on enterre Hippolyte Besson dans la petite commune de Vorzey-sur-Arzon (Auvergne), décédé à 29 ans d’un mauvais coup de sabot. Sa veuve est enceinte. 8 ans plus tard, son fis Philibert déborde d’énergie, d’enthousiasme et de turbulence. Il est toujours le premier à inventer des bêtises… mais il est le premier à l’école aussi. Le premier à sauter d’un pont dans le fleuve, le premier à crever le chapeau melon de l’ecclésiastique qui le surveille lorsqu’il est pensionnaire au Puy-en-Velay. A l’automne 1917, il se fera renvoyer de l’établissement, pour avoir participé à la bagarre de trop, face au jeune et impétueux baron Thibaud de Lignac. Pour expurger sa faute, Philibert s’engage de lui-même dans l’armée – au grand désespoir de sa mère – et il se retrouve incorporé au sein de l’artillerie qui lutte en Maurienne face à l’ennemi autrichien. Philibert se révèlera très doué dans les calculs de trajectoires des canons dont il a la charge et il permettra à plusieurs reprises à sa division de remporter des victoires décisives. Il montera ainsi en grade, jusqu’à devenir sous-lieutenant. Dans le même temps, Thibaud de Lignac viole la jeune bonne de famille, Manon, et il la met enceinte. Lorsque la marquise découvre Manon engrossée, et qu’elle apprend de surcroit que le père est son fils, elle la vire manu-militari. La jeune fille de 15 ans se retrouve hébergée par son oncle. Manon accouche peu après d’un beau bébé, que le baron de Lignac ne reconnaît pas… mais il subviendra à ses besoins en offrant notamment à Manon une maison. Il peut ainsi passer régulièrement pour assouvir ses pulsions…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Philibert Besson fut un authentique député de la IIIème République (de la Haute-Loire), qui s’est largement démarqué de ses pairs et qui est devenu une figure locale « folklorique » en raison de son parcours aventureux, son caractère excentrique et son programme défiant ouvertement l’Etat français. C’est la tumultueuse histoire de cette « météorite politique » aux allures de professeur Tournesol que les auteurs clermontois Yves le Faou (au scénario) et Laurent Bordier (au dessin) proposent de raconter en BD. Deux volumes sont a priori au programme, même si cet opus n’a pas de tomaison. Pour les besoins d’une biographie aussi richement chargée, les auteurs ne perdent pas de temps, vont souvent à l’essentiel au sein d’un découpage rythmé et recourent idéalement à l’art de l’ellipse. Graphiquement, le trait est caricatural et dynamique, assez proche de celui de Philippe Bercovici. On découvre ainsi la jeunesse tumultueuse de cet orphelin de père, ses prouesses à l’armée où il récoltera un éclat d’obus qui restera à jamais fiché dans son crâne. Il passera ainsi un temps pour fou et sera interné dans un asile… dont il s’échappera ! Ses années américaines sont occultées (faute de documentation fiable, sans doute), on saura juste qu’il a été officier de la marine marchande. Puis on découvre son engagement politique non aligné en Haute-Loire, au service des petites gens de sa région, qui le porteront aux nues. Ses idées étaient populistes, fantasques et visionnaires : pro-européen bien avant l’heure, partisan de la privatisation de la production électrique locale, promoteur du patois, il créera sa propre monnaie et haranguera la foule dans des discours programmatiques enflammés. Comme pour éviter la linéarité, les auteurs alternent sa biographie avec celle d’un autre zigue méconnu (ou fictif ?), le baron Thibaud de Lignac, farouche opposant. L’album se termine en nous donnant rendez-vous pour un second épisode.