L'histoire :
Un homme vient d’apprendre la mort de son frère dans un accident de moto. Vivant avec un homme, il profite de l’invitation de son ancien éditeur à une conférence sur les illusions autobiographiques pour le quitter. Il prend l’avion et arrive dans une ville imaginaire un peu exotique. Il emménage dans le petit appartement réservé pour lui et se rend dans la backroom d’un club, où il fait la rencontre de Miller, un grand gars moustachu, habitué du lieu. Entre eux va naître une relation douce et respectueuse. Ce dernier va l’emmener dans le parc des sculptures, le rendez-vous des homosexuels locaux, où Miller vit aussi avec le fantôme d’un jeune homme mort pour fuir le harcèlement dont il était victime. S’appuyant sur les épaules de son nouvel ami et amant, notre homo héros va laisser vaquer ses pensées, se remémorant certains passages difficiles de sa vie, et tacher de débuter son deuil...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Ce qu'on cherche souvent dans une bonne bande dessinée, c'est 1) une bonne histoire 2) une certaine originalité. Le dessin, qu'il soit plus ou moins classique ou très expérimental, arrive pratiquement en troisième position. Koma fait partie de ces romans graphiques modernes matchant ces trois désidératas. L’histoire part d'un constat initial dramatique : un accident. Puis elle évolue très rapidement dans une direction presque onirique, sensuelle et sauvage, au sein de laquelle le graphisme prend une place très particulière. Léonie Ott dessine dans l'esprit d'auteurs récents très bien accueillis, tels certains croisés aux éditions Réalistes, le trait d'Antoine Cossé venant cela-dit encore davantage en référence à l'esprit. Une recherche graphique formelle, pas d'espaces inter-iconiques, et des couleurs douces, appliquées de manière très choisie dans des cases aux dimensions variées, souvent pleine page. Les textes, quant à eux, évoluent soit en bulles, soit sous forme de voix off, dont de simples formes obliques relient les phrases ou mots dans des mouvements de souffle venteux. Rien que cela charme et envoûte, illustrant à merveille un récit parfaitement structuré dans le fonds, ce qui paraissait improbable au départ. Cette adaptation de la pièce de Nazlum Nergiz, dramaturge et écrivain né en 1991 à Istanbul et basé entre Amsterdam et Berlin, a tous les atouts d'un chef d’œuvre. Léonie Ott, qui a étudié l'histoire de l'art et le théâtre à Berlin, puis publié les fanzines Dr.Hobbes et Saumucke vol. 2 et mène la collection de bande dessinée Colorama aux côtés de Johanna Maierski, a signé avec Koma sa première publication a compte d'éditeur chez März en 2023. Le début, sans nul doute, d'une belle carrière, si les scénarios suivant sont du même niveau.