L'histoire :
En juillet 2016, lors d'un voyage familiale en Italie, au détour d'une discussion anodine, Salva avoue à ses parents qu'il fume de temps en temps un peu de marijuana. C'est la crise ! « Mon fils est un drogué ! ». Salva est obligé de s'expliquer sur cette pratique, qu'il n'apprécie finalement que moyennement. Il commence à raconter son premier contact avec un joint : lors d'une soirée, en avril 2005, son pote Laurent était sorti et avait accepté d'essayer de taffer sur le joint d'un copain. Quand Salva avait vu cela, il avait fait un rejet total. Salva était revenu danser en étant en rogne contre son pote qui versait soudain dans la drogue. Six mois plus tard, c'était pourtant à son tour de demander à Laurent de tirer sur son premier joint. C'était à une soirée étudiante. Laurent était sorti, sur proposition de pétard de la part d'un copain. Salva l'avait suivi et lorsqu'on lui avait tendu le joint, sans trop savoir ce qu'il devait faire, Salva avait pris une taffe. On lui avait alors expliqué la méthode pour que les effets soient optimaux : bien aspirer à fond, bloquer la respiration et puis relâcher doucement ces volutes épaisses. Salva s'attendait à pénétrer dans une dimension mystique, à voir des trucs invisibles à l'œil nu... Au lieu de ça, il avait juste eu la tête qui lui tournait un peu. Décevant... Mais les effets de « lâcher prise » avaient été autrement plus dramatiques sur le propriétaire du joint : déchaîné sur la piste de danse, il s'était fait une fracture ouverte à la jambe...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après les premières pages de lecture de ce petit bouquin en bichromie et à couverture souple, on croit être tombé sur une énième émanation nombriliste d'un « dessineux », comme il s'en épanouit des kilotonnes dans la sphère des blogs BD. Comme il l'indique en 4ème de couv', Salva partage en effet son expérience de la marijuana, en faisant son coming-out sur le sujet. Chaque chapitre décrit une approche différente du fumage de joints, selon une échelle chronologique. Ça commence par un rejet choqué, puis une première expérience, puis une addiction, en passant par des anecdotes de bad-trip, de space-cake ou de sensation de verser dans une voie sans retour, au moment de la première rencontre avec un dealer. Bien que le livre ne s'épargne pas quelques longueurs, Salva raconte cela de manière simple et directe, avec une grande sincérité. La sincérité des auteurs est d'ailleurs la marque de fabrique des éditions Monsieur Pop-Corn. Hormis le besoin intime de se livrer sur le sujet, de déculpabiliser par la franchise, on ne voit donc pas trop où Salva nous emmène avec ce retour d'expérience standard. A notre époque, bien que la vente soit pénalisée, la pratique privée de la marijuana est tolérée. Tout le monde (ou presque) a fumé un joint, comme tout le monde a un jour mangé des pâtes ou promené un chien. D'autant que le dessin simple et basique de l'auteur ne révèle pas de grandes dispositions artistiques. Le récit est certes fluide et lisible, mais il ne transcende pas le 9ème art. C'est alors que les dernières planches font prendre une orientation plus constructive à l'intention et un double sens au titre. En demandant « après tout ce que tu nous racontes, pourquoi fumes-tu encore ? », le père de l'auteur remet son fiston et le lecteur face à leur destin. Smoking out ne signifie plus la mise à nue d'un auteur concernant le fumage de pétards, mais comment en sortir, après mûre réflexion d'un fumeur repenti. L'ouvrage de Salva n'a certes pas l'ambition de donner des leçons de morale, mais ce partage d'expérience sincère peut s'avérer un biais utile pour quiconque se pose la question d'arrêter la fumette. D'ailleurs, quelqu'un aurait-il la méthode « Reading comics out » ?