L'histoire :
A Rome, en 2072, Rocco Basile est programmateur d’interfaces de sécurité, l’un des meilleurs. Mais il souffre aussi de petits troubles schizophréniques, qui lui valent de prendre un traitement quotidien. Ce jour-là, au réveil, son assistant vocal lui annonce son agenda : il doit aller renforcer le système de sécurité au ministère de la Santé, dans le bureau du ministre lui-même. Rocco s’équipe donc et traverse Rome en transports en commun, jusqu’au bunker du Ministère. Malgré sa dégaine de junky désabusé, il passe tous les contrôles de sécurité, jusqu’au bureau du Ministre. Ce dernier l’accueille et lui précise qu’il devra travailler en sa présence car il doit relire un dossier. A quatre pattes sous une table, Rocco se met donc au boulot, consciencieusement. Soudain, trois types armés font intrusion et mitraillent le ministre de plusieurs balles, dont une en plein front. Ils n’ont pas vu Rocco sous la table, mais ils le repèrent au moment où ce dernier s’enfuit. Par chance, Rocco détale vite à travers les coursives. Double veine, il parvient à éviter la pluie de balles qui le canardent. La course-poursuite le mène jusque sur les toits. Acculé, il s’agrippe à un câble et joue les Tarzan jusqu’à traverser le vitrail d’une église voisine désaffectée. Il s’en tire à bon compte : quelques coupures et contusions. Il rentre chez lui, perplexe d’être en vie et angoissé… mais il n’ose franchir la porte de son appartement. Les tueurs l’ont sans doute déjà identifié, c’est certain. Il ne peut plus rentrer chez lui. La providence met alors sur son palier une jolie et aimable voisine, Veronica, qui l’invite à se soigner chez elle…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En Franco-Belgique, le dessinateur italien Corrado Mastantuono est surtout répertorié pour ses participations aux albums sur les Angry Birds, ou sur des collectif Disney et des histoires de Donald… Mais si on se remémore Elias le Maudit (chez les Humanos, il y a une douzaine d’années), on se souvient d’un style graphique réaliste à la fois soigné, précis et très mature. C’est avec cette griffe très aboutie et très agréable, des personnages toujours impeccablement proportionnés, cadrés et animés dans des décors toujours finis et soignés, que l’auteur, devenu complet, dégaine de nouveau ce Klon en one-shot. Son rythme et son suspens sont bien inscrits dans le thriller d’anticipation. Le héros est à la fois un peu junky, car traité pour sa schizophrénie, et programmateur en interfaces de sécurité. Un double biais bien pratique pour le confronter à un complot de santé publique mondiale et jouer avec les faux-semblants quant à sa perception de la réalité. Est-il victime d’hallucinations ou la dernière chance d’éviter un empoisonnement mondial de grande envergure ? Le registre de la proche anticipation permet de plonger les personnages dans le décor d’une ville de Rome proche de notre actuelle, juste légèrement technoïdifiée. Au cœur des problématiques, les questions de sécurité informatiques et la maîtrise du clonage humain sont de réels enjeux de demain… mais Mastantuono sait rester suffisamment évasif sur le sujet pour ne pas être dépassé par la réalité dans les prochaines années. La narration n’est certes pas des plus immersives : on se perd un peu entre les faux-semblants et les pensées du héros déclinées en de nombreux narratifs sentencieux, qui diluent la tension. Mais le lecteur assidu sera récompensé par un rebondissement final qui remet tout en cohérence.