L'histoire :
En ce jour ensoleillé, une calèche doit ralentir à cause de la procession d'un troupeau. A son bord, un officier de l'Armée française peste sans discontinuer. Anselme de Saint-Geraud rejoint la garnison de Mont-Dauphin, accompagné de sa splendide épouse, Anaïs. Si le jeune gradé répond à son ordre d'incorporation, sa femme revient sur ses terres natales du Queyras. Elle-même fille de militaire, elle rejoint une ville dont elle connaît bien les us et coutumes. Son père a longtemps été basé à Mont-Dauphin et elle vécut ses jeunes années ici même. Alors qu'elle taquine son mari avec les particularités locales et le patois qu'il s'y parle, elle ne tarde pas non plus à attirer les convoitises des camarades de garnison d'Anselme. Cette femme fait tourner les têtes comme le vinaigre attire les mouches. Bagatelle et paquetage ne font pas bon ménage et tout cela aurait pu rester anecdotique, si une série de meurtres n'était venue troubler la grande muette...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Avant d'évoquer les qualités de ce diptyque réunie ici en intégrale, il convient de rappeler que les éditions Mosquito ne manquent jamais de proposer à leurs lecteurs une qualité de papier qui devient rare. C'est peut-être un détail pour vous (...). Mais revenons à nos moutons du beau pays du Queyras. Si on en croise un troupeau dans la première scène, on aura aussi à faire avec une bande de bovidés rassemblés dans cette garnison située non loin de la Durance. Très vite, la belle épouse Saint-Geraud va faire tourner les têtes des bidasses de ce début de siècle. La scénariste Nelly Moriquand concocte en effet une enquête basée sur l'étude des mœurs de l'époque. Ce dépaysement fonctionne à merveille. Nous voici plongés dans cette région sauvage des Hautes Alpes, que l'hiver rigoureux transforme en coin austère. A défaut de réel mystère, la tension s'installe rapidement. Le trouble que cause Anaïs en fait aussi un personnage particulièrement intéressant. Loin d'être provocatrice, elle apparaît au contraire comme une victime, ce que la suite du récit démontrera aussi. Fabien Lacaf met en images ce drame, avec des décors particulièrement soignés qui renforcent les ambiances. Tout y passe : de la montagne au bourg, en passant par les fortifications, sans oublier le travail sur les costumes. Son visuel chiadé mais jamais surchargé fait forte impression. Autant de bonnes raisons d'apprécier à leur juste valeur ces deux albums ici réunis.