L'histoire :
Il y a des siècles, en Orient. Trois frères régnaient sans partage sur leur royaume. Ils se vouaient bien du respect. Plus que cela, Shahzam'am chérissait Shariyar et le temps ne les avait que trop séparés. Il fit venir l'intendant de son palais et demanda qu'on lui prépare le meilleur des destriers pour rejoindre son frère. Mais il oublia le poignard que sa reine lui avait offert et dont il ne se séparait jamais. A peine les murs de son royal domaine franchis, qu'il fit demi-tour. Le Roi entra dans ses appartements et trouva son poignard mais aussi autre chose : un de ses serviteurs séduisait son épouse. Au lendemain matin, leurs têtes surplombaient les murailles et le souverain s'en alla rejoindre son frère. Après de chaleureuses retrouvailles, alors qu'il déambulait dans les immenses jardins de son frère, il surprit à son tour l'épouse du suzerain en de coupables dispositions. A son tour fou de rage, Shariyar exigea de son peuple qu'on lui livre une femme pure chaque nuit. Et chaque lever du soleil, le bourreau ferait son office. Jusqu'à ce que Sharaz-De se livre, proposant au Roi de le divertir en lui contant de bien singuliers récits...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
C'est en 1979 que Sergio Toppi accepte une commande de la revue milanaise Alter Alter. Il s'agit de laisser au maître transalpin le soin de livrer sa version des Contes des mille et une nuits. En dix numéros répartis sur deux ans, de 1979 à 1981, il livre environ 150 planches pour huit récits époustouflants. Car Toppi ne reprend pas le folklore. Point de lampe d'Aladin, pas plus que de caverne d'Ali Baba. Il choisit délibérément de s'appuyer sur un mode narratif qui se répète invariablement. C'est à chaque fois la même scène qui se joue : Sharaz-De/Shéhérazade remet chaque soir sa vie entre les mains de son suzerain. L'aube est sensée inviter le bourreau, sauf à ce que le Roi l'épargne, car elle seule peut retenir son attention au travers des étranges histoires qu'elle lui conte durant la nuit... Toppi joint au tour de force narratif son unique savoir-faire. Il produit page après page des planches donnant le tournis, qui saturent l’œil, qui vous envoûtent comme la voix de Sharaz-De emportait l'âme de son Roi. Ses illustrations, souvent des « pleines pages » donnent le tournis, attirant l’œil en mille et un recoin. Puis, au début des années 2000, les éditions Mosquito suggérèrent à Toppi de concevoir une suite. C'est en 2005 qu'elle fut publiée, directement en français cette fois-ci. Et cette intégrale reprend donc l'ensemble de ces contes, dans une édition particulièrement soignée, qui fait l'objet d'une très belle préface signée par Jean-Louis Roux. Les mots nous manquent, en réalité, pour vous décrire la beauté de l’œuvre, qui allie la puissance du dessin à la subtilité des textes. Sharaz-De, c'est une invitation au voyage. Une lecture intelligente sans jamais être pédante, une pure merveille couchée sur papier. Un absolu indispensable !