L'histoire :
20 titres de la chanson Napolitaine, partant du XVIème siècle pour arriver dans les années 50 et le célébrissime Tu vuo fa’ l’americano, en passant par la Tarentelle et Funiculi Funiculà, sont traduits et décortiqués par Christian Charrier, illustrés par Edmond Baudoin. La première chanson, Tu sai che la cornacchia, est une villanelle, une petite danse rustique accompagnée de musique et de chant. Le refrain permet de s’abandonner. Ici, il se fonde sur le chant de la corneille (Crai) qui, en napolitain, signifie aussi demain. L’illustration montre un homme à genoux devant une immense femme nue à tête de corneille. Fenestra Vascia, la 2ème chanson, date du XVIIIème siècle. C’est une chanson d’amour perdu mais aussi une critique sociale du modèle urbanistique napolitain, qui date du XVIème siècle et un édit du vice-roi don Pedro de Tolède interdisant les constructions hors des murs d’enceinte, et aboutissant à la construction des Palazzuotti les plus hauts d’Italie, avec la bourgeoisie dans les étages et les pauvres dans la rue...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
D’accord, ça n’est pas vraiment une BD. En fait, pas du tout. Cet album est plutôt un recueil de chansons, plus ou moins illustrées. Plutôt moins d’ailleurs, les peintures, dessins et esquisses d’Edmond Baudoin illustrant de manière très personnelle et souvent très très libre les chansons et chansonnettes napolitaines. On y trouve tout ce qui fait le sud dans son outrance et sa légèreté, de l’amour à la politique, en passant par le paraître, si important, la misère et l’émigration, la nourriture bien sûr… Tous les clichés magnifiques et bien réels d’une province à part dans la botte italienne, fournisseur des terroni, terme péjoratif utilisé par les italiens du nord, riche et industriel, pour désigner les italiens du sud, pauvres et moins éduqués, comme le « paysan » dédaigneux des urbains du XIXème siècle. On se plonge avec bonheur dans ce très bel ouvrage où les mots virevoltent en tarentelle, où les dessins sont une invitation permanente au voyage, à l’amour, à la rêverie. On en ressort plus riche d’anecdotes (on ne résiste pas à celle de l’écriture du gigantesque Funiculi, Funicula), d’histoires et d’Histoire. Un bel objet, qui sent le soufre, le basilic, la tomate et le piment, la sueur et les larmes de l’amour…