L'histoire :
Hergé, c'était l'ami délicat, gai profond et modeste de Michel Serres. Un grand homme doux, une sorte de Jules Verne des sciences humaines. Ses bandes dessinées ont fait rire et éduqué des millions d'enfants, en leur faisant découvrir la beauté du monde et des cultures. Hergé faisait voyager en voiture, en chemin de fer, en avion et en fusée. Il a permis de faire vivre le Tibet, l'Orient, les mers du Sud, la banquise, la Lune, avec sa bande de joyeux personnages, du Capitaine Haddock, au professeur Tournesol, en passant par la Castafiore et Sérafin Lampion. En toute humilité, Michel Serres avoue avoir plus appris en se plongeant dans les aventures de Tintin, qu'en potassant cent livres théoriques d'un mortel ennui et stériles de résultats. Il n'hésite pas à dire que L'Oreille cassée qui évoque le fétichisme, lui a plus appris que les écrits de Sigmund Freud, Karl Marx, Auguste Comte, voire le président de Brosses ! Hergé avait coutume de dire qu'il commençait une histoire et qu'il la laissait aller se développer comme du lierre. Une belle parole qui trouve sa place dans l'imaginaire de tous.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En 2016, l'expo Hergé au Grand Palais a rencontré un franc succès. A cette occasion, les Éditions Le Pommier et Moulinsart eurent la bonne idée de rééditer Hergé mon ami. Cet ouvrage a été écrit par le philosophe Michel Serres, disparu en 2019, membre de l'Académie Française, dont on a bu volontiers les paroles sur Radio France. Cet illustre penseur a bien connu Hergé, avec lequel il a noué une belle amitié. Il a d'ailleurs consacré deux essais au père de Tintin et Milou : Les Bijoux distraits ou la cantatrice sauve (1972), puis Tintin ou le picaresque d’aujourd’hui (1977). Il est même devenu administrateur de la Fondation Hergé au début des années 2000. Hergé mon ami revient sur la poésie de la ligne claire, devenue une référence tenace dans le 9ème art (dont Chaland, Ted Benoît, Bob de Moor, Schwarz, Peter Van Dongen plus récemment furent ou sont les héritiers), sur l'invitation au voyage, ou encore au picaresque ! Quand on referme ce livre, on se dit que le regard de Michel Serres nous manque, notamment après une année 2020 chaotique. Son éclairage à l'accent chantant aurait assurément une formidable résonance.
