L'histoire :
Faustine, 15 ans, est seule dans son appartement situé au-dessus du « Nombril du monde », un local fermé, jadis dédié au théâtre d‘impro. Comme tous les soirs, elle raconte une sorte de journal intime sur une mini cassette audio, à l’intention de sa mère. Elle se plaint notamment de son père, qui a annoncé son départ le matin même. Un père pour le moins marginal, qui se promène avec une tête d’oiseau et qui met en permanence en doute la réalité de sa propre existence. Avant de partir, ce drôle de père lui a raconté une anecdote étrange qu’il a vécue quand il était enfant. Dans les sous-sols d’un immeuble en construction, il avait été « possédé » par une sorte de sphère bleue qui l’avait propulsé durant quelques heures dans un pan parallèle de la réalité. Dès lors, sa perception des gens et de la vie en a été bouleversée. Faustine écoute cela comme un conte bizarre et ne change pas pour autant son quotidien terre-à-terre. Le lendemain, c’est le lycée, les copains et les pétards, puis le soir venu, la voisine casse-pied du dessous qui monte lui offrir du gâteau…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Bizarre bizarre… Le premier tome de cette trilogie annoncée déstabilise au premier abord, à la fois en raison de la non-linéarité de sa narration et des sujets abordées. Déstabilisant, mais pas inintéressant. Il s’agit ni plus ni moins ici de remettre en question le réel et l’immuabilité du temps, des sujets philosophiques et existentialistes portés par une jeune fille a priori « normale ». Le pragmatisme de l’héroïne permet en effet de garder un châssis contemporain qui rassure et structure le récit : le lycée, le pétard avec un pote, le mal de crâne, la voisine casse-bonbons… A 15 ans, Faustine est donc bien dans ses baskets et elle a les pieds sur terre, contrairement à son père. Mais cet homme à tête d’oiseau, qui brille d’emblée par son absence, est-il réel ou fantasmé par la jeune héroïne ? Qu’est-il arrivé à sa mère ? Quel message l’auteur Serge Annequin veut-il nous délivrer à travers ce conte urbain onirique ? Pour le savoir, il faudra attendre de lire les 2 prochains volets…Utilisant un trait « moderne », le dessin marque par la froideur de sa colorisation : du gris omniprésent, juste rehaussé de quelques teintes éteintes, à la limite de la bichromie. Notre monde est décidément bien triste. Le principal grief qu’on peut porter à ce visuel vient des visages des personnages, dessinés de manière bien sommaire (surtout en gros plans) sans qu’on comprenne ce parti-pris graphique. Bref, le morne contexte contemporain choisi par l’auteur n’est sans doute pas innocent, qui relaie l’aliénation de la vie moderne avec ce volcan islandais interdisant subitement tout échange aérien durant plusieurs jours.
