L'histoire :
Plage de Ca'n Pastilla, Majorque, 1983. Le grand-père n'était pas quelqu’un comme les autres. Tonton Luis (c'est comme ça qu'on appelait son meilleur ami, ils s'étaient connus en 1939) disait que c'était l'homme le plus courageux qu'il connaissait. Qu'il lui avait sauvé la vie plusieurs fois pendant la guerre. En 1999, quand le grand-père meurt, on retrouve trois manuscrits relatant de nombreux détails dont personne n'a jamais entendu parler. Il s'agit de ses mémoires, qu'il a rédigées dans les années après-guerre. Ces cahiers contiennent aussi des documents qui ont, aujourd’hui, une valeur historique. Il y raconte comment il quitte l'Espagne en 1939 et comment, en 10 ans, il va servir 5 drapeaux différents...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
N'ayons pas peur des mots, ces 5 drapeaux sont un enfant de Maus. Le FIBD d'Angoulême ne s'y est pas trompé en consacrant une expo à Pau, qu'on avait découvert avec La saga d'Atlas & Axis. Dans sa nouvelle BD, l'espagnol retrace le parcours de son grand-père Vicente, engagé républicain quand la guerre d'Espagne a éclaté. L'auteur a réuni une documentation impressionnante pour l'occasion et il commence par traiter de la retirada, l'immense exode : 500 000 espagnols qui fuient les massacres et passent les frontières françaises. Le pays de la Liberté, de l’Égalité et de la Fraternité ne leur a offert que des camps, qu'on voudrait aujourd'hui nommer « camp d'internement », mais qui n'étaient rien d'autre que des camps de concentration. Au Barcarès, à Saint Cyprien, à Argelès, on établit des camps à 4 km de la première habitation. 500 mètres de large et une double rangée de barbelés, sauf côté mer. Au 4 coins de ces camps et le long des barbelés, des soldats français patrouillent et pointent leurs mitrailleuses vers les réfugiés... Le récit de Pau se décline comme un chapelet de souvenirs de son grand-père, Vicente et il est marqué par son authenticité, qui résulte de la gravité de l'époque. Un sacré bourlingueur, que son grand-père Vicente ! Mais on ne vous en dira pas plus. Comme toujours avec Pau, le recours au style animalier permet de ne pas plomber la narration. Son dessin rond et cartoonesque est une nouvelle fois un régal pour les yeux. Il se charge également des couleurs. Pour vous dire si l'homme est méticuleux, il est allé jusqu'à utiliser un calendrier lunaire pour choisir la lumière la plus fidèle pour une scène nocturne ! On remarque aussi les quelques pleines pages splendides, qui viennent clôturer des scènes. Ce 1er tome est une grande réussite. On attend donc vivement la suite.