L'histoire :
Téter du whisky de contrebande directement à la sortie de l’alambic : c’était le bon vieux temps ! Celui où Lincoln – le cow-boy plus immortel que son ombre – pouvait rendre la vie pénible à la pauvre bourgade du Montana dans laquelle il avait échoué (voir le tome 7). Intégré de force à l’armée US pour éviter le bagne à perpétuité, il vogue désormais vers la France avec ses compatriotes pour combattre l’ennemi allemand. En cette année 1917, la Grande Guerre accueille en effet l’allié américain pour donner un coup de main aux français. Sur le paquebot qui conduit notre teigneux vers sa destinée, Lincoln se fait un devoir de plumer le moindre soldat en jouant au poker à longueur de journée. Il ne s’agit pas là d’un simple passe-temps pour s’amuser. Mais plutôt d’un plan bien rodé. Notre compère souhaite en effet amasser un petit magot pour se faire la malle dès son arrivée et trouver un coin peinard où – pour une fois – personne ne viendrait l’emmerder. Il s’est déjà renseigné et pense pouvoir poser valoche et fessier dans le sud-ouest de l’hexagone : c’est loin du front et la spécialité locale à la robe vermillon, du bouquet en pagaille et un gout de « retourne’z’y ». Un beau projet qui, conjugué à un petit trafic juteux (vente de bibine au marché noir), dès son arrivée à St Nazaire, pourrait se montrer rapidement gagnant-gagnant. Mais la bonté de notre cow-boy ronchon et le sergent Morris chargé de la gestion du magasin semblent parfaits pour jouer les empêcheurs de tourner rond…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Contraint de rejoindre les rangs de l’armée américaine, suite à un tourbillon de couillonnades éthyliques au creux des neiges du Montana (voir Le fou sur la montagne), l’immortel cow-boy foulera dans ce 8éme tome notre « terre-patrie ». Grande Guerre oblige, le voilà qui tâte en effet du barbelé allemand, hume le parfum des tranchées, saute sur de l’obus et avale de la bonne vieille bibine bien de chez nous. Tout ça, évidemment, sans aucune intention de servir une cause, quelle qu’elle soit. Si ce n’est – bien entendu – la sienne, en particulier guidée par la récupération d’un beau paquet de billets. L’occasion est aussi faite, au regard des circonstances, de vérifier que notre bonhomme garde intact ses galons d’immortalité (à moins que…). Si cette nouvelle virée hors frontière permet au clan Jouvray de livrer un moment fort divertissant, force est de reconnaître que ce 8ème opus « claque » un peu moins. Certes cet incroyable couillon – judicieusement modelé au fil de la saga – nous attache à son aventure sans aucune difficulté, mais on reste un peu sur sa faim. Les ingrédients habituels sont pourtant là mais peut être dosés en deçà. Par exemple, à l’inverse des grenades et des balles de fusils, les dialogues (tout de même marrants) explosent en dessous de l’habituel. La confrontation Dieu/Diable est moins jubilatoire ; le cynisme moins grattant ; les seconds rôles moins lumineux ; la leçon humaniste (ici l’esquisse de la condition noire-américaine) moins frappante… Bref, à force d’avoir joué les « Monsieur Plus » d’album en album et placé la barre au sommet, notre Lincoln s’essouffle un chouya. Gageons que cette gueule de bois sera passagère et que la suite nous servira une nouvelle lampée de tord-boyaux haut de gamme à se faire péter zieux zet zygomatiques avec jubilation. On aime tellement ça !