L'histoire :
En un temps médiéval et barbare reculé, Shayne est une combattante aguerrie au service du roi. Entre les périodes de combat, elle joue aux dés et boit dans une taverne, mais refuse systématiquement les avances de ses compagnons d’arme. Dans la maison d’à côté, Leander, un ornithologue passionné, déduit du comportement de ses colombes qu’un évènement inquiétant va se produire. Quant à Shelter, la diseuse de bonne aventure, elle passe une nuit de plus avec un amant adultère. Au petit matin, les gardes du château sont en panique car personne ne répond à l’intérieur des appartements du roi. Le capitaine Elms fait enfoncer la porte et découvre que la famille royale, sa cour et les officiers supérieurs sont absents. Ici et là, gisent des serviteurs de second rang, assassinés. Le roi et ses proches ont semble-t-il quitté le château en passant par un passage secret… mais pour quelle raison ? La nouvelle se répand en ville comme une traînée de poudre. Les brigands en déduisent que c’est le moment d’en profiter pour violer et piller. C’est très vite la guerre civile. Shayne découvre sa maison en flammes et elle doit jouer de son épée et de ses poings pour se débarrasser de pillards. Au terme de 3 jours de chaos, Shayne, Leander et Shelter survivent et se retrouvent à former une équipe solidaire, bientôt complétée par Tétra, la petite fille d’une esclave de plaisir qui a disparu avec le roi. Une créature dragonnesque, un lingual, sauvage mais intelligent, jusqu’alors enfermé dans les oubliettes, se libère et suit le groupe à distance. Après quelques observations et témoignages, il semble que le roi soit parti se réfugier dans les hauteurs, en prévision de l’apocalypse qui s’annonce. Car une étoile brille de plus en plus, et les savants prédisent une collision avec la Terre dans une quinzaine de jours…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Le premier « mariage » entre le prolifique scénariste belge Stephen Desberg et le non moins doué dessinateur chinois Chaiko, se déroule donc chez Paquet. Shayne se présente comme un autre genre de mariage insolite, entre le début pré-apocalyptique de L’étoile mystérieuse (oui, oui, le 10ème Tintin, où une météorite géante fonce vers la Terre) adapté à l’ambiance du genre médiéval fantastique. En effet, comme il est souvent coutume dans les quêtes d’heroïc-fantasy, une alliance de circonstance se forme entre des compétences insolites : une guerrière, un ornithologue, une diseuse de bonne aventure, une fillette et un lingual. Dans les bestiaires d’heroïc-fantasy, un lingual est une sorte de petit dragon, très violent, mais sans ailes et sans crachage de feu. Bref, et ces cinq protagonistes se mettent en quête. En quête de quoi ? Leur objectif semble tout à la fois de fuir le chaos, de se mettre à l’abri en hauteur, et de retrouver leur roi qui en a fait autant devant l’imminence de l’apocalypse. Il faudra bien sûr attendre le second volet du diptyque pour savoir si apocalypse il y aura, ou pas. Et de quelle gravité ! La fin pure et simple de ce monde ? Le récit prend le temps à se mettre en place. Il faut effectivement attendre la page 21 pour que les noms des protagonistes soient donnés, au moment où ils se réunissent. Avant cela, Desberg installe l’atmosphère obscurantiste en un découpage séquentiel chorale, jouant avec les narratifs lyriques. Ce n’est pas ce qu’il y a de plus efficace pour accrocher le lecteur… mais ensuite, une fois les circonstances, les protagonistes et la problématique posés, l’intrigue se laisse agréablement suivre. Quant à l’artiste, Chaiko fait du Chaiko : précis, expressif, réaliste, avec des ambiances pesantes et des décors brumeux et orageux à souhait. Ayez peur, braves gens, c’est la finhinhin du monhonhonde…
